Bernard-Henri Lévy


Complément d’Enquête : quand Bernard-Henri Lévy convainc François Mitterrand d’aller à Sarajevo

Le siège de Sarajevo permet à Bernard-Henri Lévy de s’inviter de façon spectaculaire sur la scène diplomatique en 1992. Après un séjour mouvementé sur place, il revient à Paris et persuade le président Mitterrand de s’y rendre. L’image fera le tour du monde. Extrait de “Complément d’enquête” du 6 août.

“Il a une puissance d’attraction qui fait que même les présidents de la République aiment, peut-être même souhaitent, travailler au côté de Bernard-Henri Lévy, ou lui-même auprès d’eux, à un moment donné dans une crise particulière. C’est un grand talent qu’il a d’être persuasif au sommet des États”, affirme Bernard Kouchner, ancien ministre de la Santé et de l’Action humanitaire (1992-1993). La crise bosniaque et le siège de Sarajevo au début des années 1990 donnent l’occasion à BHL de s’illustrer sur la scène internationale. L’écrivain tirera de cette expérience le film Bosna ! sorti en 1994.

Le 13 juin 1992, l’écrivain est interrogé par la télévision bosniaque dans les rues de Sarajevo en proie aux affrontements armés. Les tirs redoublent, les balles sifflent et Bernard-Henri Lévy continue de parler calmement avant de poursuivre l’entretien à l’abri d’un muret. “Ce n’est pas la première fois que je me trouve dans une situation de guerre”, affirme-t-il la voix posée, enfin au cœur de l’action, et devant la caméra. La véracité de la scène a été mise en cause par certains médias, mais le journaliste bosniaque la confirme pour la première fois au magazine Complément d’enquête. BHL lui a dit vouloir aller rencontrer le président François Mitterrand dès son retour à Paris pour lui demander d’aider les habitants de Sarajevo bombardée et affamée. Il va tenir son engagement.

“Une idée qui a de l’allure”

“Bernard est allé voir le Président et l’a convaincu de ce que je n’avais pas réussi à faire, c’est-à-dire de faire participer la France plus activement à la libération des habitants de Sarajevo qui subissaient un siège depuis très longtemps”, se souvient celui qui deviendra plus tard ministre des Affaires étrangères pendant le quinquennat de Nicolas Sarkozy (2007-2010). Hubert Védrine, l’un de ses prédécesseurs au Quai d’Orsay pendant la cohabitation de 1997 à 2002, confirme : “Il suggère au Président de faire un geste spectaculaire en allant à Sarajevo pour affronter le blocus. François Mitterrand est conquis par cette idée qui lui permet de faire quelque chose qui a de l’allure.” L’ancien secrétaire général de l’Élysée (1991-1995) précise que ce “signe de solidarité va être merveilleusement bien reçu par le président Izetbegović et bien sûr par les habitants”.

Le 28 juin 1992 a donc lieu le voyage éclair du président François Mitterrand, déjà très affaibli par la maladie, dans la ville de Sarajevo assiégée. L’hélicoptère blanc présidentiel se pose sur l’aéroport rouvert de la ville. Un voyage tenu secret pour créer un effet de surprise et relancer le processus de négociations. L’image de ce coup d’éclat politique et diplomatique fera le tour du monde. Grâce à ce déplacement, les organisations humanitaires vont pouvoir travailler à nouveau sur place. Hubert Védrine estime que Bernard-Henri Lévy a dû en garder la frustration de n’avoir pas pu engager “la France et François Mitterrand au-delà de ce geste. Un beau geste, mais il souhaitait plus, en fait. C’est spectaculaire, mais ça montre la limite d’une influence de ce type”.

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Complément d’Enquête : quand Bernard-Henri Lévy convainc François Mitterrand d’aller à Sarajevo