MARIANNE : A suivre votre parcours depuis trente ans, on a l’impression que vous êtes à la fois l’inventeur et la victime de cette nouvelle catégorie d’acteur public baptisé « l’intellectuel médiatique ». Vous avez, mieux que quiconque, œuvré à cette nouvelle forme de célébrité qui passe essentiellement par les interventions médiatiques contre l’ancienne légitimation par l’université, les œuvres et les pairs. Mais vous avez ainsi lancé un processus inflationniste au cours duquel le contenu des interventions ne cesse de perdre de sa valeur à mesure de leur multiplication. A 60 ans, vous en êtes ainsi réduit aujourd’hui, dans le 12e tome du recueil de toutes vos interventions – dont beaucoup d’entretiens — (Questions de principes XII, Grasset), à reproduire pour la postérité vos interviews avec Thierry Ardisson qui vous interroge encore sur vos chemises blanches ou avec Frédéric Beigbeder qui vous demande dans quel palace vous descendez quand vous allez nager à l’île Maurice…
BERNARD-HENRI LÉVY : C’est comme ça que vous avez lu ces 1300 pages ? Bon. C’est votre droit. Je vous signale juste que, pour quelques lignes drolatiques sur mes chemises blanches, vous avez des dizaines et des dizaines de pages où je débats avec Francis Fukuyama, Anatol Lieven, Alain Finkielkraut ou Norman Mailer. A part ça, vous avez l’air de faire de l’université le lieu de passage obligé pour la légitimation d’une parole philosophique. Or, c’est ne rien savoir, cette fois, de l’histoire de la philosophie que de voir les choses ainsi. Ni Spinoza, ni Descartes, ni Leibniz, ni Sartre – et j’en passe ! — n’ont fonctionné de cette façon. Il faut vraiment toute la frilosité contemporaine, et l’abaissement de la pensée qui va avec, pour voir dans cet écart vis-à-vis de l’université quelque chose qui condamnerait une réflexion… Ça commence bien !
Vous êtes l’un des rares à ne pas vous intéresser à la question de la saturation médiatique, qui fait l’objet de discussions de plus en plus inquiètes chez ceux qui sont soucieux de la qualité du débat public, alors que cette machine infernale a fini par vous lessiver. Vous croyez vous servir des médias, mais le rendement est de plus en plus décroissant. Dernier exemple : votre correspondance avec Michel Houellebecq, annoncé comme un grand big-bang dans toutes les gazettes, a fait « pschitt » après quinze jours d’agitation médiatique !
BHL : Ne soyez pas si impressionné par ces histoires de médias ! Elles n’ont pas tant d’importance, vous savez. Elles ne méritent sûrement pas, en tout cas, de se mettre dans l’état où vous semblez être. Reprenons tranquillement les choses. L’aventure de ce livre avec Michel Houellebecq est, finalement, assez simple. Il y a eu quinze jours d’agitation médiatique, en effet. Puis des semaines, des mois, j’espère bientôt des années, de pénétration en profondeur, d’échange silencieux avec les lecteurs, de traductions un peu partout. Pourquoi parler de « big-bang » ? De « pschitt » ? C’est juste le cours normal des choses. Et une belle aventure littéraire qui a tranquillement trouvé son public…
Sur le long terme, votre écho médiatique résulte d’interventions répétitives et très formatées sur deux registres très différents : soit le consensuel défonçage de portes à moitié ouvertes, soit la provocation. On retrouve cette dualité dès le départ, avec La Barbarie à visage humain, médiatisation habile du nouveau consensus antitotalitaire et L’Idéologie française, livre expliquant que le fascisme était une invention française et qui fut jugé à l’époque fantaisiste par tous les spécialistes de la question, de Léon Poliakov à Michel Winock, de Pierre Nora à Jacques Julliard…
BHL : D’abord, essayez d’être précis. Léon Poliakov, pour ne citer que lui, avait suivi l’élaboration de ce livre et je l’en avais d’ailleurs publiquement remercié. Pour le reste, que vous dire sinon que je ne parle pas, là non plus, comme cela ? La pensée, ce n’est pas une affaire de « portes ouvertes » ou « fermées ». Quand on mène les combats qui sont les miens depuis trente ou trente-cinq ans, on n’a pas envie de se laisser entraîner dans votre médiologie de bazar. Pour être clair, je n’ai jamais nié, bien sûr, qu’il y ait eu des prédécesseurs à certaines des thèses de La Barbarie à visage humain. La seule vraie question que j’aie envie de me poser aujourd’hui est celle de savoir ce qu’André Glucksmann ou moi disions de plus que, mettons, Raymond Aron ou Jean-François Revel. Eh bien, dans La Barbarie, je prétends qu’il y avait une minuscule valeur ajoutée à la réflexion totalitaire de l’époque. Et cette valeur ajoutée, c’était le concept de « volonté de pureté ». Voilà. Disons les choses comme ça. Expliquer que le totalitarisme est toujours réductible à une volonté de guérir, un médicalisme, une clinique, c’était mon humble apport à une réflexion dont je ne vous ai pas attendu pour m’aviser qu’elle avait eu ses précurseurs, ses illustres pionniers, ses penseurs capitaux…
Dans La Guerre en philosophie vous revendiquez la fabrication de « concepts » tels que la « pureté dangereuse » ou « l’idéologie française ». En fait de concepts, ne s’agit-il pas surtout de simplifier le réel, en se concentrant sur les effets sans s’intéresser aux causes, en tranchant de façon binaire entre le bien et le mal et, surtout, en ne discutant pas avec l’adversaire que vous préférez diaboliser ?
BHL : C’est exactement l’inverse. Dans les deux cas que vous citez, le but (et le résultat) fut moins de « simplifier le réel » que de le complexifier ! Prenez le concept d’Idéologie française. Expliquer que les fascistes n’étaient pas tous à droite, qu’il y a eu du pétainisme au sein du Parti communiste, que la gauche n’était pas peuplée que de saints hommes, rappeler que, jusque dans les rangs de certains groupes de Résistance, on trouvait un numerus clausus concernant les juifs, et rappeler que, aujourd’hui encore, il y a un « fascisme de gauche », est-ce que vous ne croyez pas que c’était une bonne manière de lutter contre le mauvais génie de la simplification ? C’est d’ailleurs bien parce que mon concept compliquait l’affaire, c’est bien parce qu’il brouillait les repères auxquels nous avait habitués la paresse intellectuelle de nos aînés, que j’ai vu se liguer contre moi tant de gens aussi différents !
Non. Vous confondez deux choses. Il y a la logique du combat politique où, en effet, je simplifie, parfois même je caricature, car je veux, avant tout, mobiliser, convaincre et l’emporter. Et vous avez la logique spéculative qui, y compris là, dans Pièces d’identité, produit des textes dont n’importe quel lecteur honnête verra qu’ils vont contre les facilités de l’esprit de simplicité. Maintenant, « dialoguer » avec l’adversaire ? C’est une autre question. Je le fais bien sûr. J’ai même passé ma vie à le faire. Sauf que je ne tombe pas non plus, pour autant, dans la niaiserie pseudo-démocratique qui laisse penser qu’il y a un peu à prendre chez l’un, un peu chez l’autre, que la vérité est entre les deux et que c’est en dialoguant, en frottant sa pensée à celle du voisin, qu’on va identifier, en chacune, sa part de vérité. Dieu sait si je suis démocrate. Mais pas dans la pensée. Pas : y a partout du bon, personne n’a le monopole de la vérité, la vérité vraie est au milieu. Cela étant dit, affronter l’autre, dialoguer au sens de confronter son point de vue au sien, ça oui, bien sûr ! cent fois oui ! Et c’est même d’ailleurs ce que je m’apprête à faire, un jour prochain, sans doute à l’École normale, avec Alain Badiou.
Ce n’est peut-être pas un hasard, vous êtes tous deux assez symétriques, tant pour votre goût de la simplification que pour votre conception de la vérité : pour vous et Badiou, celle-ci semble moins le fruit de la recherche, de l’enquête ou du débat, qu’une « bonne position » qu’il faut tenir de façon guerrière par tous les moyens. Cela, Raymond Aron, adepte de l’échange rationnel, ne l’avait ni compris ni admis en disant que vous étiez « perdu pour la vérité » après sa lecture de L’Idéologie française…
BHL : Ouais… Le plus « perdu pour la vérité » n’était peut-être pas celui qu’on pense. La recherche de la vérité est, je vous le répète, un travail, un effort, un exercice solitaire, une ascèse parfois – certainement pas une transaction où l’on tiendrait compte des diverses « opinions » afin d’arriver à un hypothétique juste milieu. Les politiques travaillent comme ça. Ou les instituts de sondage. Ou les avocats. Pas les philosophes. C’est pourquoi, quelque respect que m’inspirent l’homme Aron, sa rectitude morale, son courage, je n’ai jamais réussi à le tenir pour un grand penseur. Trop prudent pour cela. Trop sage. Trop dans ce souci de ménager les uns, les autres. Et, du coup, une recherche de la vérité qui cède souvent le pas à l’apologie du bon sens. Nous parlions de Badiou. Je ne pense pas qu’il y ait, dans l’aronisme, les armes nécessaires à la défaite de cette « hypothèse communiste » que Badiou et les siens sont en train de nous rebricoler…
La différence n’est-elle pas ailleurs : il y avait chez Aron la passion de convaincre, y compris l’adversaire, alors que vous expliquez vous battre « sans chercher à convaincre ». Plutôt que d’affronter vos adversaires, vous préférer l’emporter par l’efficacité du remarquable réseau que vous avez constitué en trente ans dans la presse, l’édition, la politique et les affaires. N’êtes-vous pas plus à l’aise dans le trafic d’influence que dans la polémique ?
BHL : Trafic d’influences, je vous laisse la responsabilité du propos… La seule chose que j’aie à vous dire c’est qu’il y a, de nouveau, plusieurs régimes dans la vie d’un intellectuel. Il y a la bataille politique où il faut marquer des points : pas par tous les moyens, comme vous semblez le penser ; mais pour gagner, ça oui, c’est sûr ; pour convaincre l’opinion face, par exemple, au silence des nations sur le Darfour ou à la distorsion de la vérité sur le Rwanda ; et quand on a le sentiment d’avoir gagné, quand le point a été marqué, alors, oui, c’est vrai que c’est comme une position qu’on a conquise, qu’il convient alors de garder et de fortifier. En face, vous avez le travail personnel, la philosophie, où le problème n’est pas de chercher l’avantage, mais de chercher la vérité. Et, entre les deux, il y a ce régime intermédiaire qui est le débat entre pairs, le choc entre deux visions du monde – mais avec un objectif qui est moins de « rallier » autrui à sa cause que d’affûter ses propres arguments, de les rendre plus performants, plus tranchants, plus justes encore. Aron – on en revient toujours à lui – a pensé, toute sa vie, que, s’il avait Sartre en face de lui, il le ferait renoncer, par la voie de ce que vous appelez « l’échange rationnel », à ses positions les plus extrêmes. Eh bien je pense, moi, qu’il se trompait. Et que, s’ils avaient dialogué, les deux seraient restés fidèles à leurs préjugés, leurs passions, les concepts qui en sont le produit.
Mais quel est l’enjeu de « vérité » quand votre site Internet relève avec des roucoulements qu’une revue américaine vous a désigné comme le 31e personnage « le plus influent du monde », et le premier des Français devant Dominique Strauss-Kahn, Esther Duflot et Jacques Attali ? Vous y croyez sérieusement ?
BHL : Décidément, vous avez, vous, pour le coup, des procédés inattendus pour des apôtres de l’« échange rationnel ». Liliane Lazar qui est, à Long Island, New York, la créatrice et responsable de ce site (et, par ailleurs, la patronne aux États-Unis des « Simone de Beauvoir Studies ») appréciera les « roucoulements »… A part ça, que voulez-vous que je vous dise ? Que la très sérieuse revue Foreign Policy classe les penseurs « influents » je n’ai pas à y croire ou ne pas y croire, c’est un fait !
Votre rapport aux faits n’est pas toujours aussi scrupuleux : le trait complémentaire de votre rapport à la vérité est de rester silencieux quand les faits invalident les positions binaires que vous avez soutenues. Avez-vous une fois reconnu une erreur ?
BHL : …Peut-être en ai-je commis moins que vous ne pensez ! Vous avez des exemples ?
A propos de l’Afghanistan, le fait d’applaudir dès 2001, la « victoire éclair d’une stratégie américaine, d’une habileté, d’une efficacité militaro-politique insoupçonnées » sur des talibans, vaincus « sans combattre » et « ayant détalé comme des poulets ». Huit ans plus tard, cette « victoire éclair » sur des « poulets » relève plutôt du songe éveillé…
BHL : Pas du tout. En 2001, la victoire militaire était là. Sauf qu’elle a été gâchée par des mauvais stratèges, des piètres politiques et les huit années de bushisme.
Il n’y a jamais eu de victoire militaire en 2001 en Afghanistan !
BHL : Bon. Comme vous voudrez. Quand, en 2001 l’Alliance du Nord et les Américains reprennent Kaboul et permettent à Karzaï de s’installer au pouvoir, j’appelle ça une victoire militaire.
A ce détail près que Kaboul n’est pas l’Afghanistan, on l’a malheureusement vu par la suite ! Autre erreur, à propos de la Bosnie. Vous avez soutenu – et même conseillé, dites-vous – le président Alija Izetbegovic, que vous avez présenté comme un prophète de l’islam des Lumières. Mais on ne vous a pas entendu quand le personnage réel, islamiste militant, a dévié de votre conte de fées.
BHL : Pardon. Mais vous dites, franchement, n’importe quoi. L’islamisme militant, chez Izetbegovic fut une tentation ancienne (sur laquelle on m’a maintes fois entendu) pas une déviation ultime (que j’aurais pieusement passée sous silence). Je parle de tout cela dans Bosna ! J’en parle dans mon journal de l’époque, Le Lys et la cendre. Je rapporte les conversations que nous eûmes, avec cet « islamiste », sur Israël, sur Salman Rushdie qui avait projeté, avec son accord, un voyage à Sarajevo. Quant au « conte de fées » c’est encore votre fantasme personnel ; car, en ce qui me concerne les choses étaient assez simples : Izetbegovic était un conservateur ; j’ai dit cent fois (y compris à lui) qu’en temps de paix, et si j’avais été bosniaque, j’aurais été son opposant ; mais là, on était en guerre et il était, dans la guerre, le lieu géométrique de tous les courants de la résistance du pays…
Plus récemment, on ne vous a pas entendu non plus lorsque cette Bosnie que vous présentiez comme le modèle d’une « Europe multiculturelle » a interdit aux juifs et aux Tsiganes de participer aux élections…
BHL : C’est faux, voyons ! Faux et idiot. C’est votre site, Marianne, qui a lancé cette histoire ridicule…
Vous êtes mal informé, il s’agit d’un jugement de la Cour européenne des droits de l’homme — que vous encensez habituellement — qui a condamné la Bosnie pour discrimination à l’encontre des juifs et des Tsiganes.
BHL : C’est vous qui allez trop vite. La Cour européenne des droits de l’homme a pointé, en effet, l’une des conséquences les plus perverses du système mis en place par les accords de Dayton, c’est-à-dire par la communauté internationale, et qui crée des institutions au sein desquelles le pouvoir tourne, obligatoirement, entre représentants des trois « nationalités » : catholiques croates, musulmans bosniaques et orthodoxes serbes. Le problème est là. C’est navrant. Scandaleux. Ruineux pour ce qui reste de l’esprit « bosnien ». Mais on ne peut pas dire, comme ça, qu’on interdirait aux juifs et aux Tsiganes de participer aux élections…
Vous alternez en permanence, selon les circonstances et quand cela vous arrange, du simplisme du combat à la complexité de la pensée. Ainsi à propos des États-Unis pour lesquels vous cédez à la pensée du soupçon et du complotisme que vous dénoncez à juste raison chez ceux qui nient la réalité des attentats du 11 septembre : vous-même réduisez tous ceux qui critiquent l’hégémonie américaine à des conspirateurs antisémites. L’hyperpuissance américaine n’existe pas pour vous, et encore moins depuis l’élection d’Obama. Mais on peut se féliciter de son élection et de l’éviction de Bush sans oublier qu’il n’est pas le président du monde, mais des États-Unis.
BHL : Attendez ! Ne faites pas semblant de ne pas comprendre. Je n’ai jamais réduit l’antiaméricanisme à je ne sais quelle « conspiration antisémite ». En revanche, je m’intéresse au cas d’un certain nombre de gens (Ahmadinejad, Hugo Chavez et quelques autres) dans la rhétorique desquels est apparu un nouvel objet politique qui s’appelle « l’axe américano-sioniste ». Eh oui ! C’est passionnant, les mots. C’est passionnant, la façon dont ils fonctionnent, s’agrègent, s’affolent, voyagent. De même que n’est pas sans intérêt le fait, par exemple, que le vrai lieu de naissance de l’antiaméricanisme est, en France, le maurrassisme.
Il ne s’agit pas d’antiaméricanisme, mais du constat réaliste que le président des États-Unis défend aussi les intérêts des États-Unis. On a bien vu à Copenhague par exemple qu’il défend d’abord des intérêts nationaux, intérêts nationaux dont vous pourfendez la légitimité pour la France…
BHL : Ah oui ?
Vous expliquez tout le temps que le cadre national doit être dépassé pour le cadre européen.
BHL : Exact. Mais c’est parce que les intérêts nationaux de mon pays seront mieux défendus dans un cadre européen.
C’est pour cela que vous avez milité l’an dernier pour la réintégration, décidée par Nicolas Sarkozy, de la France au sein du commandement intégré de l’Otan ?
BHL : Naturellement. Mon raisonnement était très simple : dans la situation antérieure, on avait tous les inconvénients de la présence dans l’Otan sans en avoir les avantages et sans avoir la possibilité, en particulier, de peser sur ses décisions.
Avec cette intégration, la France n’aurait pas pu, comme l’a fait Chirac, s’opposer à la guerre d’Irak !
BHL : Je n’en sais rien. Et vous non plus. La seule chose sûre c’est que Chirac n’a rien empêché du tout. Il a gesticulé. Villepin a pris la pose. Mais est-ce que la politique se réduit à des postures ? Est-ce que le rôle d’un grand pays est de prononcer des discours « historiques » à l’ONU ? Et qui sait si, membre du commandement intégré de l’Alliance, la France n’aurait pas pu convaincre son allié de l’absurdité de cette guerre ?
Lorsqu’on se dit à la pointe de l’antitotalitarisme, et en particulier après avoir eu des sympathies de jeunesse pour le totalitarisme maoïsme, ne devrait-on être plus attentif et plus préoccupé par cette nouvelle monstruosité politique que constitue la Chine, une dictature qui fonde sa nouvelle puissance sur l’exploitation d’un prolétariat détruit par le communisme ?
BHL : Oui, bien sûr. Hélas, la vie est courte et les journées aussi, mais je suis prêt à signer tout ce que vous voulez sur la question. Je trouve par exemple que, parmi les responsables de la crise financière dont nous sortons à peine, il n’y a pas que les traders, les parachutistes dorés et les retraités américains, mais qu’il y a aussi les pétroliers vénézuéliens et les conglomérats chinois pilleurs de matières premières, apôtres d’un capitalisme de jungle et exploiteurs d’un prolétariat asservi comme nulle part ailleurs. Quant au vernis idéologique dont ce régime s’affuble, il n’abusera que les gogos : l’une des leçons de cette « nouvelle philosophie » dont vous sembliez, tout à l’heure, méconnaître les mérites n’est-elle pas que le communisme est toujours une pensée d’ordre et que la rhétorique « prolétarienne » est toujours une manière d’embrigader, discipliner, réduire en esclavage, les ouvriers de chair et d’os ? Les Chinois sont des gens sérieux. Ils savent cela. Ils appliquent juste le programme.
Vos silences sont aussi expressifs que vos interventions, surtout ceux qui suivent celles dont le bilan n’est pas fameux. En expliquant que le fascisme était au cœur de l’identité française, vous avez acclimaté à gauche l’idée selon laquelle il fallait défaire la nation pour lutter contre le racisme et l’antisémitisme présenté comme un éternel mal français. C’est le contraire qui a eu lieu. L’éloge du « droit à la différence » lancé par SOS Racisme — que vous avez parrainé — a encouragé les communautarismes, et vous fûtes sans voix lorsque l’on dut constater, il y a une dizaine d’années, que la recrudescence des actes et propos antijuifs relevait d’un antisémitisme fort vigoureux mais essentiellement d’importation.
BHL : Vous êtes vraiment marrants ! J’ai dû être l’un des premiers, en tout cas dans ma génération, à tirer la sonnette d’alarme sur cette affaire de « droit à la différence » qui n’a, philosophiquement, aucun sens. Quant à la nation française, je n’ai cessé de dire mon amour entier et vif pour celle du général de Gaulle, d’André Malraux, de Levinas, celle de l’universalisme républicain, celle de la Nation-Idée, celle qui se veut ouverte, non à la différence, mais à l’altérité. Mon adversaire, c’est le souverainisme, qui n’a évidemment rien à voir avec l’amour ou non de son pays puisque c’est l’autre nom d’une doctrine politique. Laquelle ? Celle qui dit, en gros : « La nature d’un régime a moins d’importance que la simple persévérance de la nation dans son être. »
Quant à l’antisémitisme, faites attention ! C’est, aussi, le lieu de toutes les confusions. Vous avez l’antisémitisme traditionnel de droite, en régression, résiduel. Vous avez l’antisémitisme de gauche qui fait au juif le triple reproche a) de trafiquer sa propre souffrance, b) d’éclipser celle d’autrui et c) de le faire aux seules fins de renforcer cet Etat inacceptable, voire fasciste, qu’est l’Etat d’Israël – celui-là est en progression, aux États-Unis non moins qu’en Europe, et avec ces mêmes trois ingrédients que sont donc le négationnisme, la concurrence des victimes et l’antisionisme. Et puis, enfin, vous avez un troisième antisémitisme, d’inspiration islamiste, qui est encore, en France, relativement marginal.
Votre distinction entre le deuxième et le troisième antisémitisme semble artificielle : le négationnisme est peut-être forgé en Occident, où il reste marginal et clandestin, mais c’est un produit d’exportation principalement consommé au Moyen-Orient où il est vérité officielle dans beaucoup de régimes qui n’ont rien de gauche ! Faurisson est un grand savant en Iran, pas en Europe…
BHL : C’est vrai. Parce que les sages catégories de droite et de gauche sont des catégories de temps de paix et qu’elles sont évidemment pulvérisées face à ce genre de flambées.
Pour finir sur vos silences, vous avez été plutôt discret lorsque François Mitterrand a enfin assumé dans son parcours son étape pétainiste…
BHL : J’étais comme tous les Français : d’abord incrédule, puis accablé. L’article que j’ai écrit s’intitulait d’ailleurs : « Chagrin et pitié ». Après, vous vouliez quoi ? Que j’en fasse davantage ? Que je hurle avec les loups ? J’aimais profondément cet homme. Je pense qu’il m’aimait bien, lui aussi. C’est vrai que ce papier, c’était le maximum de distance que je pouvais prendre.
Maximum de distance ? On y a alors vu plutôt un service minimum venant de quelqu’un connu pour sa facilité à débusquer du pétainisme partout. L’on vous a trouvé soudainement en petite forme alors que François Mitterrand en rajoutait en assumant avec une certaine provocation terminale son passage aveugle à Vichy.
BHL : Peut-être, oui. Nous ne sommes pas des machines. Et sans doute y a-t-il des moments où la politique doit composer avec les affects. Ce que je peux dire, en tout cas, c’est que j’ai rompu avec lui à ce moment-là. Je ne l’ai plus jamais vu. Hélas.
Récemment vous vous êtes élevé contre ceux qui comparaient de manière infâme les ministres de Nicolas Sarkozy et lui-même à quelques sinistres personnages de Vichy. « C’est tout simplement inepte ! » avez-vous tonné. A la bonne heure, a-t-on envie de dire, car c’est tout de même vous qui avez introduit dans le débat public français cette déplorable habitude de voir Pétain et Maurras derrière tous vos adversaires… On peut même considérer qu’Alain Badiou, avec son « pétainisme transcendantal », est l’un de vos élèves…
BHL : C’est vrai que je ne trouve pas absurde ce concept de « pétainisme transcendantal ». Ce qui est scandaleux, en revanche, c’est de l’appliquer à tort et à travers – et, en l’occurrence, au sarkozysme.
Alain Badiou aurait donc maquillé votre « idéologie française » en « pétainisme transcendantal », mais il s’en sert comme une brute ?
BHL : C’est un bon outil dont on peut faire un mauvais usage.
Comment se manifeste le pétainisme aujourd’hui ?
BHL : Dans le souverainisme, par exemple.
L’hommage à Séguin fut donc un grand moment de pétainisme ?
BHL : Mais non, pourquoi voulez-vous que je pense cela ?
On se demande pourquoi vous ne le pensez pas, si les souverainistes sont pétainistes, Seguin l’était !
BHL : Non. Il était plus compliqué que ça. Il ne pensait pas, comme un souverainiste classique, qu’en Serbie, ou en Irak, ou ailleurs, charbonnier est maître chez soi. Qui est souverainiste, aujourd’hui ? Je veux dire, au sens où je l’entends ? Et, par la même occasion, pétainiste ? Jean-Pierre Chevènement, par exemple. Il en a tous les réflexes et l’armature conceptuelle.
Alors là, on ne comprend plus du tout où vous en êtes : vous avez bien, lors de la dernière élection présidentielle, soutenu Ségolène Royal aux côtés de Jean-Pierre Chevènement ? Et l’on peut ajouter que vous avez été battu par Sarkozy aidé par un autre souverainiste, Henri Guaino. En fait, vous avez peut-être contribué à la défaite de Ségolène Royal en l’empêchant de faire la synthèse à gauche que Sarkozy a réussie à droite ?
BHL : Mais oui, pourquoi pas ? Je ne l’aurais pas dit comme ça, mais c’est assez bien vu. C’est peut-être pour cela, allez savoir, que j’ai été aussi présent auprès de Ségolène Royal… Il y avait, dans ses premiers discours, toutes ces histoires de drapeau tricolore, d’encadrement militaire des écoles, de jurys populaires, etc. Eh bien, mettons que je voulais qu’elle gagne, mais pas avec ça, pas comme ça, pas sur cette base – pas ce mélange de robespierrisme soft et de nationalisme sot qu’incarnait auprès d’elle, en effet, Jean-Pierre Chevènement. Alors voilà. Je suis heureux de voir que cette femme brillante, rapide, informée, ait fini par refuser ce piège. Et si je l’ai aidée, tant mieux.
On peut faire l’analyse inverse et considérer que votre offre de service à la gauche — notamment avec votre livre Ce grand cadavre à la renverse, dont le PS a fait grand cas en vous intronisant quasiment comme l’intellectuel organique du parti — est moins une contribution à sa relève que le symbole de sa déréliction. On sait en effet que les principales difficultés du PS depuis 2002 sont la perte de ses électeurs populaires et son discours inaudible sur la question sociale après un ralliement empressé au néolibéralisme dont il ne parvient pas à faire le bilan… Or vous êtes parfaitement en harmonie avec cet aveuglement crucial puisque vous vous vantez publiquement d’être « un peu sourd à la question sociale ». Propos qui vous rapprochent plus de Marie-Antoinette que de Léon Blum !
BHL : La différence, c’est que je me soigne ! Ma différence avec beaucoup d’autres, si vous préférez, c’est que je suis honnête avec moi-même. Un intellectuel est toujours, presque par définition, « un peu sourd à la question sociale ». Rien ne m’insupportait plus que la position d’un Bourdieu qui, du haut de son statut mandarinal, nous la jouait « grande pythie du mouvement social ». Mais bon. Je fais des efforts. J’essaie d’aller au-delà de cette surdité de position. Je suis un sourd qui, je vous le répète, fait des efforts pour entendre. Dans Pièces d’identité, de nouveau, il y a un long texte que j’ai écrit à l’occasion de la commémoration de la naissance de la Croix-Rouge et où j’essaie de réfléchir aux formes nouvelles de la pauvreté, de la précarité, vingt ans après Coluche…
Ça, c’est la charité, pas la justice sociale qui doit être au centre d’une politique de gauche. Pourquoi avez-vous écrit que le Front populaire ne faisait pas partie des grandes dates de l’histoire de la gauche ? Et comment peut-on se dire de gauche en délaissant ainsi la question sociale ?
BHL : Calmez-vous ! Je suis en train de vous dire qu’il n’est pas question, justement, de la délaisser. Quant à dire que s’occuper des nouvelles précarités, c’est de la charité, bon, c’est un avis, le vôtre, mais ce n’est pas le mien.
Quand vous verra-t-on au chevet des salariés naufragés par la désindustrialisation ?
BHL : Le problème n’est pas d’aller « au chevet » de tel ou tel, mais de réfléchir. Par exemple, en effet, sur les usines délocalisées. Mais, par exemple aussi, sur les banlieues en déréliction.
Vous n’allez pas plus dans les unes que dans les autres…
BHL : Vous n’en savez rien. Mais le problème, je vous le répète, ce n’est pas de faire de l’ouvriérisme, ou du misérabilisme, ou de la démagogie, mais de…
Sartre, qui est une de vos icônes, y allait…
BHL : C’est vrai. Et je trouve d’ailleurs que l’image dont on s’est tant moqué de Sartre sur son tonneau à Billancourt est une belle image. A son honneur.
Quand vous verra-t-on sur un tonneau à Sarreguemines ?
BHL : Attendez. Je ne suis pas encore mort. Et puis on essaiera de renouveler le scénario.
Vous expliquez pourtant en permanence que l’important est d’aller sur le terrain, ce que vous faites aux quatre coins du monde, mais on a l’impression que, pour vous, la croisade pour la dignité humaine commence à Roissy… Même sur la question des droits de l’homme — qui vous est plus familière que la question sociale —, vous choisissez les combats lointains plutôt que les enjeux au sein de la société française. Un exemple : vous vous êtes beaucoup engagé pour défendre Salman Rushdie, Taslima Nasreen et Ayaan Hirsi Ali, tous trois menacés par ceux que vous avez qualifiés de « fascislamistes » parce qu’ils revendiquaient la liberté de création et l’égalité entre hommes et femmes. Mais vous ne vous êtes jamais intéressé à la situation des jeunes femmes dont les libertés sont également menacées sur le sol français où quelques-unes ont déjà brûlé au nom d’une pureté dont vous dénoncez la dangerosité dans vos ouvrages.
BHL : Vous êtes, vraiment, d’une mauvaise foi qui devient presque comique ! La quantité d’arguments que j’ai développés contre le voile et la burqa, le combat que je mène pour un islam modéré honorant la femme au lieu de la considérer comme un objet de scandale, un outrage vivant, qu’il faudrait cacher à toute force, mon soutien immédiat, constant, à Ni putes ni soumises, qu’est-ce que tout cela dit d’autre que cette proximité de principe avec les femmes dont vous parlez ?
Ni putes ni soumises a appelé, il y a quelques jours, à une manifestation de soutien à la dramaturge féministe algérienne, Rayhana, agressée à l’essence et au briquet en plein Paris où elle osait présenter une pièce impossible à monter en Algérie : il y avait 300 personnes et aucune grande voix des droits de l’homme…
BHL : C’est vrai. Et c’est dommage. J’aurais été là, si j’avais pu. Mais il se trouve que j’étais, ce jour-là, à Jérusalem – organisant une rencontre entre quelques-uns des plus hauts responsables de l’Etat israélien et deux représentants de la révolution verte iranienne. Il y a des jours où j’aimerais, vraiment, avoir le don d’ubiquité…
Vous arbitrez plus souvent pour le lointain que pour le proche…
BHL : Écoutez… On va faire un peu de ba-b.a. – d’accord ? Si je vais à Gaza ou en Géorgie, ce n’est pas seulement pour parler aux Gazaouis ou aux Géorgiens, mais aussi à mes concitoyens français. Quand je vais au Darfour, c’est aussi pour défendre un cas d’islam modéré et éclairé, donc les Français sur le débat essentiel de notre époque qui est celui de l’islam intégriste versus l’islam démocrate. Car je vous signale, entre parenthèses, ce détail. Ce pauvre Darfour, ce Darfour désolé, dévasté, génocidé, est aussi, comme la Bosnie autrefois, un pays où vous pouvez faire 800 km sans jamais voir une femme voilée, ni une burqa, ni des écoles séparées pour les filles et les garçons. Il n’y a que Sarkozy pour croire que l’islam est un bloc et le traiter comme tel.
Votre rapport à Nicolas Sarkozy est étrange. Vous ne cessez de le mettre à distance tout en le défendant aussi régulièrement. Et, pour vous dire de gauche, on voit mal quels coups un combattant comme vous lui a vraiment portés. Il faut dire que cela a commencé fort par un article assez étonnant et peu connu publié aux États-Unis où vous faisiez la leçon à la France choquée par la soirée au Fouquet’s et les vacances de Nicolas Sarkozy à Malte sur le yacht de Vincent Bolloré au lendemain de son élection. Vous défendiez cette provocation « bling-bling » en expliquant qu’elle « illustrait la partie de son projet qui nous encourage à nous déculpabiliser vis-à-vis du luxe, du succès et de l’argent, fût-ce au risque de sombrer dans le mauvais goût et le kitsch ». Vous ajoutiez : « Et si, finalement, ce jeune président voulait réconcilier la France, sinon avec le bonheur, avec les signes du bonheur que notre puritanisme, notre déprime, notre crainte des paillettes et du succès, ont longtemps discrédités et réprimés ? » Une telle réconciliation — sur laquelle Nicolas Sarkozy n’a pas cédé depuis — relève-t-elle de votre conception de la gauche ?
BHL : Sur Sarkozy, je suis prêt à tous les combats d’idées. Je suis vent debout contre son débat sur l’identité nationale, la politique de ses Besson et Hortefeux, hier l’affaire des tests ADN. Mais je refuse les attaques sur sa personne ou son comportement. Je refuse, je trouve monstrueux, le côté Le Pen moquant le prénom – Solal – de son petit-fils. Je refuse, je trouve nauséabondes, les allusions à sa supposée vulgarité, son côté nouveau riche – toute cette histoire de « bling-bling ». Ça, c’est un premier problème. Après, l’autre problème c’est que, sur l’argent, je pense qu’il faut arrêter avec l’hypocrisie bourgeoise : je préfère un président qui dit les choses, qui les assume, qui ne se cache pas, à un président qui fait la même chose mais sans le dire et en s’en cachant ; je pense que la culpabilisation de l’argent est une maladie française et qu’il est bon que ce tabou-là soit levé ; l’ère Mitterrand a commencé de le faire, l’ère Sarkozy continue, et tant mieux.
Cette défense provocatrice du Sarkozy « bling-bling » a au moins le mérite d’assumer un statut sociologique qui, vous le disiez, vous éloigne de la question sociale…
BHL : Comme tout intellectuel.
Non, votre cas est très particulier. A la tête d’une belle fortune, vous expliquez vivre entre Paris, Marrakech et New York, avec domestiques en livrée, voiture avec chauffeur et avion privé. Gide disait qu’« être à l’abri du besoin rend libre », mais à ce point de liberté n’est-ce pas un handicap pour bien conseiller une gauche qui a déjà tendance à oublier que son destin électoral dépend d’une population française accablée par la crise et l’accroissement cynique des inégalités ?
BHL : D’abord, vous ne savez rien de ma « fortune ». Ensuite, je n’ai jamais « expliqué » vivre entre ceci et cela. Et enfin je crois, oui, que la liberté n’est jamais un handicap. Quand la Russie envahit la Géorgie et que l’aéroport de Tbilissi est fermé, ce n’est pas mauvais d’avoir la possibilité de louer un avion privé et de venir, tout de suite, témoigner de ce qui se passe.
Mais, même au-delà de Roissy, il y a un débat commun, le plus commun même – la grande crise économique — qui concerne tout le monde dans le monde, et qui ne semble pas vous intéresser…
BHL : Si, bien sûr, il m’intéresse. Mais il y a des domaines où j’ai peut-être plus à apprendre qu’à transmettre. Cette crise est d’une complexité colossale. Je ne suis moi-même – cela ne vous aura pas échappé – pas spécialiste en économie. Donc, oui, j’ai la modestie de ne pas trop en faire….
Modestie ou habileté pour s’abstraire d’un débat sur le capitalisme financier qui ne vous est pas étranger comme investisseur ? Vous vous êtes ainsi caché, il n’y a pas si longtemps derrière une citation d’Althusser pour dire que « l’économie n’existe pas ». N’est-ce pas une défausse un peu obscène de vivre de l’économie et de dire qu’elle n’existe pas parce qu’un intellectuel communiste a fait un bon mot qui n’a avancé personne ?
BHL : C’est votre insistance qui devient un peu obscène, vous ne trouvez pas ? Je suis un écrivain. Pas un investisseur.
Un acteur du capitalisme financier ?
BHL : Non plus.
Alors comment vous définissez-vous ?
BHL : Je vous le dis. Comme un écrivain. Quant au mot d’Althusser, ne faites pas semblant de ne pas comprendre : cela veut dire qu’il y a les données économiques, bien sûr ; la machinerie de la crise ; mais que ce qui est aux commandes, toujours, c’est la politique. Pas l’économie, la politique.
Habituellement cela ne vous intimide pas, la politique !
BHL : Eh bien soyez patients. Vous verrez – et vite – qu’elle m’intimide moins que jamais.
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