EDMONDE CHARLES-ROUX : Bernard-Henri Lévy, vous venez de terminer votre premier roman, un vrai grand roman extrêmement romanesque, sans rhétorique aucune. Ce n’est pas exactement l’ouvrage qu’on attendait de vous. On ne vous croyait pas romancier à ce point. Nous allons parler ensemble de ce roman, essayer de l’analyser, de faire partager aux lectrices de Femme l’intérêt que suscitent vos personnages. Et, avant tout, je voudrais que vous résumiez brièvement Le Diable en tête : s’il vous fallait réduire ce vaste récit de cinq cents pages à quelques lignes, quelles seraient-elles ?
BERNARD-HENRI LÉVY : Vous me posez là, vous le savez bien, la question la plus difficile pour un écrivain. Disons que ce livre raconte l’histoire d’un homme… Oui, c’est ça, l’histoire d’un homme né sous l’Occupation, dans la haute bourgeoisie parisienne et qui traversera son époque comme une espèce, tour à tour, de blouson doré ; de militant gauchiste ; de guérillero manipulé par des intérêts planétaires qui le dépassent ; d’ennemi public numéro un recherché par toutes les polices ; puis enfin de pénitent venant méditer sur ses égarements à Jérusalem… Le tout sur un fond d’aventures sentimentales voire érotiques, sur lesquelles vous me permettrez de ne pas m’attarder ici !
Voici comment se présente ce personnage dont vous n’avez pas dit le nom et qui s’appelle Benjamin. Le narrateur dit qu’il a été frappé par sa « séduction ». Et il ajoute : « J’avais en face de moi l’un de ces êtres noirs, marqués et comme élus à rebours, que l’on dirait placés au point de rencontre des forces les plus troubles de leur époque et dont la familiarité avec le Mal m’a toujours semblé lester le témoignage d’un supplément de vérité. Au bout de ce visage, il y avait le siècle. » Ce sont les premières de votre roman. Ce Benjamin a-t-il des traits communs avec vous, et lesquels ?
Au risque de décevoir, je suis obligé de dire qu’il me ressemble aussi peu qu’il est possible. Il est catholique – je suis juif. Il est fils de collabo, fusillé à la Libération – je suis le fils d’un Français libre, antifasciste de la première heure. Et sans entrer dans le détail de ma propre biographie, je crois que les lecteurs s’apercevront vite qu’il lui arrive toute une foule de mésaventures dont le moins qu’on puisse dire est qu’elles n’ont rien à voir avec moi. Pour ne rien vous cacher, j’ai voulu cela. J’ai tenu à fabriquer un héros qui soit à bien des égards mon contraire. J’ai essayé, autant que faire se peut, de conjurer la tentation narcissique, pour ne pas dire « nombrilesque » qui guette probablement tout écrivain. Bref, si j’ai écrit Le Diable en tête, ce n’est pas pour déballer, comme dit l’autre, mon « petit tas de secrets » – mais c’est parce que j’avais envie d’inventer une vraie histoire, avec de vrais personnages, de vraies visions du monde, de vraies péripéties romanesques… Et puis avec aussi, mais de surcroît, la volonté de forger une grande fable politique, métaphysique et spirituelle sur cette époque qui est la nôtre et dont je ne me lasse pas, de livre en livre, d’interroger les mystères…
Ce que vous dites est vraiment important – et j’abonde dans votre sens – car la tentation sera grande dans les milieux littéraires parisiens d’essayer par tous les biais de faire une sorte de confusion entre Benjamin et BHL. Cela étant dit, il y a beaucoup de femmes dans votre roman. Mathilde notamment, la mère du héros, qui tient une place très importante puisque l’ouvrage commence par son journal et, dans ce journal, par le récit de son accouchement. Mathilde est de la fine fleur de la bourgeoisie parisienne, à la fois touchante et assez horripilante, pleine de contradictions. Ainsi, elle éprouve un intérêt réel et sincère pour la littérature. Mais cela n’empêche qu’elle a un goût tout aussi vif pour le shopping. Ses visites chez son esthéticienne, ses dîners en ville, le souci de trouver du cuir, en pleine Occupation, pour réparer ses sandales, tiennent autant de place dans sa vie que son admiration pour Benjamin Constant ou Stendhal. Et, lorsque longtemps après sa mort, Benjamin, son fils, se remémore son caractère, il dit : « Longtemps, à la question de savoir quel métier faisait ma mère, je répondis “des courses”. » Alors, quel sentiment éprouvez-vous pour Mathilde ? Quel est votre rapport avec elle ? En un mot : aimeriez-vous avoir Mathilde pour mère ?
Ah ! Pour mère, certainement pas… Cependant, est-elle si horripilante ? Je ne suis pas sûr… N’oubliez pas qu’elle a à peine vingt ans en 1942 lorsqu’elle commence à tenir son journal… Alors, bien sûr, elle dit des sottises… Elle est mièvre… Elle a le côté sossotte et insupportable des grandes bourgeoises parisiennes qui voient la rafle du Vel d’Hiv ou le décret sur l’étoile jaune à travers les récits de leurs domestiques… Mais, petit à petit, elle comprend. Elle fait du chemin. Et en 1954, presque dix ans après la guerre, elle est, en gros, sur la position des gens comme Claudel ou Mauriac. Elle reste bien évidemment catholique (ça, je l’ai voulu) ; mais, à cause, à partir de son catholicisme elle voit dans les juifs les seuls qui, en ce siècle d’horreur et d’outrage, n’ont point démérité du nom de « fils de Dieu »… Et puis, rappelez-vous : c’est quand même elle, Mathilde, qui, pendant la guerre, après le vernissage du sculpteur allemand Arno Breker, dit cette chose qui me semble quand même fondamentalement juste : « Il y a des erreurs esthétiques, des fautes de style et de goût – je me cite de mémoire ! – qui sont parfois plus graves que des erreurs politiques. » J’ajoute, puisque vous me demandez quels sentiments j’éprouve à son endroit, que je la trouve, par-dessus le marché, follement séduisante.
Oui, elle est extrêmement séduisante. Elle le sait. Et il y a une scène en particulier, tout à fait extraordinaire, et qui arrive très bien dans le récit. C’est celle où, quelques semaines après son accouchement, elle se regarde nue dans un miroir avec une satisfaction que je trouve très proche de celle qu’éprouve Nana chez Zola. Mathilde a un pouvoir sexuel indéniable. Elle a du charme. Mais est-ce qu’on peut dire qu’elle a des qualités réelles ? Est-ce qu’elle est courageuse par exemple ? La réponse est oui, si on pense à la manière héroïque dont elle affronte le cancer qui va l’emporter. Oui aussi, si on pense qu’elle fait le voyage d’Allemagne quand tout est fichu pour aller voir son mari. Mais à côté de cela, elle peut être d’une très grande lâcheté : prenez la scène où on la voit, pendant l’Occupation, se taire plutôt que de dire à son premier mari qu’elle est choquée des intrigues qu’il mène pour fournir aux Allemands les 5000 mètres de coton jaune dont ils auront besoin pour fabriquer leurs étoiles…
Vous avez raison, bien entendu. Et il est clair que j’ai cherché, à travers ce personnage, à brosser un tableau de ces milieux ultra-privilégiés qui oscillèrent, à l’époque du fascisme, entre l’attentisme bon ton et l’infamie pure et simple. Je crois vraiment que les industriels français du textile se sont battus en 42 pour obtenir la commande des 5000 mètres de coton jaune. Je crois vraiment que tout ce que la grande bourgeoisie parisienne voyait dans l’affaire de l’étoile jaune, c’était le risque de la voir imposer à la marquise de Chasseloup-Laubat ou à la comtesse d’Aramon, nées juives. La première partie du roman se veut le reflet de ça et de…
C’est vrai, vous avez fait une peinture très intéressante de ce qu’étaient ces milieux flous, vagues, acceptant l’Occupation allemande, cherchant surtout à en tirer parti, accumulant toute une série de petites lâchetés… Mais il y a quelque chose de gravissime dans le cas de Mathilde. Et ce quelque chose détermine, à mon sens, toute la vie de son fils et par conséquent toute la vie de son fils et par conséquent toute la marche du roman : elle manque de courage au point de ne jamais avouer à l’enfant les circonstances réelles de la mort de son père ; elle n’ose pas lui dire : « Ton père a été condamnée à mort ». Alors ma question est celle-ci : n’avez-vous pas un peu méprisé Mathilde ? Cette Mathilde qui vous plaît tellement, êtes-vous sûr de l’avoir tellement gâtée ?
Écoutez, je crois que c’est comme dans la vie. Personne n’est tout blanc, personne n’est tout noir. Et j’ai tenu à éviter le manichéisme facile… Alors, en ce qui concerne Mathilde, vous avez encore une fois raison. Elle a des lâchetés. Des petitesses. Des faiblesses de caractère indéniables. Elle est menteuse, surtout. Effroyablement menteuse. Elle a même une théorie – quasi lacanienne, avec quarante ans d’avance ! – selon laquelle il est criminel de dire la vérité toute entière. Et il n’est pas jusqu’à ses séances de confession où elle ne croie théologiquement indispensable de « garder par devers elle, irrémissiblement fautive, intouchée par la grâce des mots, une bribe de péché. » Bon. Tout cela étant dit, le personnage, encore une fois, me plaît personnellement beaucoup. Pardon si ça ressemble à de l’autosatisfaction : mais je trouve Mathilde, comment dire ? érotiquement intéressante…
C’est une amoureuse, indéniablement. Elle passe du lit d’un collabo au lit d’un résistant. Et elle aurait parcouru aussi aisément le chemin inverse. Elle dit ailleurs, au plus fort de son amour pour Jean : « Toutes ces histoires d’Allemands, de Russes, de communistes, de résistants, sont le dernier de mes soucis » – ce qui est d’une merveilleuse franchise… C’est formidable d’avoir le courage de dire ça. Elle est tout à son amour. Elle ne voit pas les… à-côtés.
En effet. À la veille du débarquement, elle ne songe qu’aux stratégies qui lui permettront de « draguer » Jean… Et pendant que Paris est à feu et à sang, elle ne s’intéresse qu’à la couleur de la peau de son amant, le matin, dans la lumière qui filtre par la fenêtre entrouverte… Mais justement ! Attention ! C’est ça que j’ai voulu montrer ! Tout le propos de cette partie est de déchiffrer cette période, disons « chaude » de l’histoire de France à travers le sexe d’une femme. Tout mon propos est de lire, sur un corps de femme, à travers ce qu’il dit ou ce qu’il occulte, les déchirements, les bégaiements de l’Histoire à ce moment-là. Ce n’est bien entendu pas un hasard si Mathilde est frigide avec Édouard, le collabo engagé dans la LVF. Ce n’est pas un hasard non plus, si elle découvre la jouissance avec Jean, le résistant. Et quand je raconte cette jouissance, quand je décris un orgasme féminin, quand j’essaie de me mettre dans la peau d’une femme, et de cette femme en particulier, pour raconter de l’intérieur la découverte qu’elle fait de l’émoi sexuel, ce sont des scènes romanesques – mais ce sont aussi, et indissolublement, des séquences politiques. Ce sera la même chose, un peu plus tard, avec Marie, personnage-clé de la troisième partie du roman, puisque c’est au travers de sa sexualité de nouveau, de ses transports érotiques que je déchiffrerai l’histoire des années 60, celle du gauchisme, etc… C’est un parti pris romanesque. Mais c’est aussi, je le répète, et au-delà de tel ou tel jugement moral porté sur tel ou tel personnage, un parti pris philosophique, une certaine conception de la vérité.
Il y a un autre personnage dont il nous faut parler : c’est Jean. Là, vous avez brossé le portrait d’un type d’homme qui a effectivement existé – j’en ai connu personnellement – d’un type de résistant dont les motivations sont patriotiques, mais avec un arrière-pensée anticommuniste avouée : il faut résister aux Allemands, certes parce qu’on aime la France ; mais aussi parce que, si on ne rejoignait pas les rangs de la résistance, il n’y aurait que les communistes pour s’y trouver, se dévouer, prendre des risques et se distinguer. Alors, votre tableau des milieux de la Résistance est singulièrement peu exaltant et il n’est guère corrigé par le personnage de Jean dont nous apprendrons – c’est un des suspens du roman – qu’il a finalement tout fait, à la Libération, pour accabler et faire exécuter Édouard, le premier mari de Mathilde, sa maîtresse, – et le père de Benjamin…
Ce n’est pas mon tableau des milieux de la Résistance. C’est celui de Mathilde. Et Mathilde, faut-il le préciser ? n’exprime pas plus mon point de vue personnel que Benjamin ou n’importe quel autre personnage du livre.
Certes. Mais il n’en reste pas moins que ce Jean, qui veillera sur l’enfance de Benjamin, qui se donnera beaucoup de mal pour essayer de former, d’éduquer, de donner des principes à ce petit garçon difficile et très mystérieux, Jean, donc, n’est pas quelqu’un de très exaltant. C’est un raciste qui s’ignore. Il fait l’éloge de la torture pendant la guerre d’Algérie. Il appartient lui aussi à cette bourgeoisie confuse, combinarde, désœuvrée, égoïste, dans laquelle Benjamin, par la force des choses, est élevé. Ne croyez-vous pas que ce milieu familial est responsable des égarements futurs de Benjamin ?
En un sens, oui. Et si le livre s’appelle Le Diable en tête, il faut l’entendre aussi de cette façon : un enfant, puis un adolescent, voire un homme mûr, qui vivra dans la hantise d’un « roman familial » ignominieux dont le souvenir le poursuit comme un remords terrible. Cela dit, est-ce qu’on peut se contenter de parler de « milieu familial » ? Est-ce que ce n’est pas toute l’horreur du siècle dont mon personnage est le produit ? Est-ce que, avant d’être le fruit d’un roman familial épouvantable, il n’est pas comme un monstrueux lapsus des fascismes, stalinismes, racismes divers qui ont pris possession de l’époque ?
Je suis d’accord avec vous. Mais disons qu’avant d’être en proie aux démons du siècle il y a un moment où il n’est la proie de rien du tout sinon de sa famille… Ce qui, moi, me passionne dans Benjamin et que je trouve d’un attrait romanesque considérable, c’est qu’il a, de naissance, tout ce que beaucoup d’êtres n’ont pas reçu : la fortune, l’intelligence, la beauté, la force physique, le courage, et de très grandes qualités ; mais en réalité, si vous regardez ça de près, vous vous apercevrez qu’il est floué et qu’il a ce que disait Colette en parlant d’une femme : « trop de tout » – constatation qui équivalait pour elle, à une condamnation sans appel ! Eh bien, Benjamin, au départ, a « trop de tout ». Et le résultat c’est qu’il va être une victime, une proie ; qu’il sera sans arrêt trahi ; qu’il sera manipulé par la plupart des gens en qui il a confiance ; et que, lorsque dans ses derniers moments il fait le bilan de sa vie, qu’aura-t-il rencontré de vraiment très très bien, à part Marie ? Oui, nous n’avons pas parlé de Marie. C’est une petite étudiante alsacienne, juive, et très peu branchée sur le judaïsme, qui l’aime au point de tout quitter pour lui. Comment expliquez-vous qu’il l’ait si mal aimée, comprise, Benjamin ?
Ah ça, je ne sais pas ! Je crois que Benjamin est quelqu’un de plutôt pessimiste quant aux rapports entre les hommes et les femmes. C’est quelqu’un qui croit que la séparation entre les sexes est définitive, sans appel. Et l’idée même d’une communion entre deux êtres, d’une harmonie entre deux désirs lui est étrangère.
Alors que Marie, imagine elle, toutes sortes de subterfuges presque enfantins pour le retenir. Elle va jusqu’à prétendre qu’elle est sa propre sœur jumelle de façon à lui donner la satisfaction de croire qu’il change de maîtresse.
« Enfantins » vous croyez ? J’avais plutôt le sentiment, moi, d’une diabolique perversité.
Non. Marie est plus puérile que satanique. C’est le geste presque désespéré d’une fille très très amoureuse qui ne sait littéralement plus quoi inventer pour retenir un être plus fuyant que le mercure. Il n’y a rien à tenter pour retenir Benjamin, strictement rien. Il est évident que personne ne le retiendra jamais. Mais Marie a cet aveuglement des femmes amoureuses qui se disent : « Essayons ça et puis ça. » Je ne vois dans cette mascarade des « fausses jumelles » aucun satanisme… Cela dit, je trouve ce personnage de Marie très bouleversant : c’est la seule femme attachante du roman – je pense que vous serez d’accord avec moi.
Oui, si l’on veut…
Est-ce qu’on peut, pour finir, dire un mot du parcours politique de Benjamin ?
Ça commence comme un parcours classique avec l’histoire (que nombre de ses contemporains ont connue) de l’Union des Étudiants communistes dans les années 60, de la tentation maoïste ensuite, des barricades de Mai 68, etc, etc… Mais, très vite, ça se durcit. Et le « diable », dans la « tête » du héros, va commencer à faire des siennes : c’est le moment où on le retrouve à Beyrouth, véritable mercenaire à la solde des Palestiniens ; c’est celui où, revenu en Europe, il croise le destin des terroristes ; et puis c’est Jérusalem, pour finir – qui correspond à l’étape du repentir.
De tous les mouvements terroristes ou, disons, « extrêmes » auxquels il a participé, quel est celui auquel il a vraiment cru ? Le mouvement palestinien, il me semble, auquel il s’est donné autant qu’il était possible…
Oui et non. Je ne sais pas si l’on peut dire qu’à tel ou tel moment il a plus « adhéré » qu’à un autre. Et cela parce qu’il reste toujours en lui une part de réserve, d’infidélité fondamentale, presque de schizophrénie qui lui interdit, chaque fois, d’être tout à fait là où il est… Regardez ! Quand il est ouvrier chez Renault, il lit La Vie de Rancé. Quand il va chez les Palestiniens, dans le Beyrouth en feu des années 70, il ne rêve que de ruines romaines. Quand il se retrouve à Rome, dans la Rome des Brigades rouges, il est bien évident qu’il ne croit pas un traître mot de toutes ces histoires « terroristes ». Non : je crois qu’il n’y a guère qu’à la toute fin, à Jérusalem, qu’il coïncide avec lui-même et qu’il a l’impression de voir enfin rassemblée son identité fuyante, presque liquide. Ça aussi, c’est le côté « fable » du livre : la bourgeoisie française, les idéologies européennes, les tentations de l’Occident qui viennent, en quelque sorte, et à travers Benjamin, se suicider à Jérusalem…
Oui, la surprise finale, le rebondissement final de votre roman ont pour cadre Jérusalem – et je ne pense pas que ce soit un hasard. Il y a là une espèce de rédemption. Marie l’occupe énormément. Il reconnaît ce qu’il lui doit – et c’est un passage d’une très grande beauté. Mais il y a aussi sa mort à lui, Benjamin. C’est une mort étrange, que vous ne montrez pas. Que signifie sa dernière volte-face ? Et donnez-vous une raison profonde à sa disparition ?
Oui, c’est tout à fait ça. Je crois que les deux choses étaient nécessaires : sa mort d’une part, inscrite, en fait, dès le début de l’histoire ; et puis le fait qu’on ne la voit pas, qu’elle ne laisse pas de trace, pas de reste. Benjamin est un mort sans reste. C’est un disparu sans cadavre. « Suicide » parfait ou bien, au contraire, comme la possibilité d’un rebondissement ultime que je laisse à la discrétion et à l’imagination de mes lecteurs ?…
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