Caroline Fourest : De tous les visages croisés sur un terrain de guerre, lesquels vous empêchent de trouver le sommeil en ce moment ?

Bernard-Henri Lévy : Je suis un insomniaque chronique. Pathologique. Et depuis très longtemps ! Dans mes songes, mon ami Philippe Sollers me dit, avec cette ironie cinglante et moqueuse qu’il avait : « Voilà le problème ! Tu en as trop vu ! » Mais je lui réponds aussitôt ce que savent tous les insomniaques du monde : on perd le sommeil comme d’autres la vue ou l’odorat ; tout cela est lié à la mort, la sienne propre, la crainte de lâcher prise… Le personnage de ce livre n’est donc pas un don Quichotte hanté par de grandes causes – c’est une pauvre bête apeurée, luttant contre les démons de la nuit, et vaincue.

Que faire pour que l’Ukraine ne soit pas vaincue ? Vers quelle paix allons-nous ?

J’ai vu Zelensky lors de sa visite à Paris, pour la réouverture de Notre-Dame. Il ne conçoit, lui, qu’une paix. Celle qui, d’une manière ou d’une autre, signifierait au monde que Poutine a perdu, que l’agression n’a pas été récompensée. C’est ce que veulent les Ukrainiens : comment, sinon, justifier ces trois années de souffrances, ces montagnes de morts, ces corps et âmes définitivement brisés ? Mais c’est aussi l’intérêt du reste du monde. C’est la seule façon de dire à tous les dictateurs du monde : « Stop, les démocraties se sont réveillées. »

Comment protéger les Kurdes de Syrie ?

La France a une voix forte, une autorité morale incontestée et une longue tradition de soutien au peuple kurde. Elle peut donc entraîner la communauté internationale. Renforcer ceux qui, comme Michael Waltz, le National Security Adviser de Trump, portent, aux États-Unis, le même flambeau. Et là, dans l’immédiat, obtenir une zone d’interdiction aérienne au-dessus des zones du Rojava que les milices pro-turques harcèlent et dévastent quotidiennement. C’est une question de vie ou de mort pour un grand petit peuple qui est l’incarnation même de cet islam des Lumières dont le monde a tant besoin.

Vous avez écrit sur la « solitude » d’Israël, que faut-il pour que le feu cesse à Gaza ?

Que le Hamas le décide. C’est-à-dire, concrètement, qu’il rende les armes et libère les otages. Le feu cessera demain, littéralement demain.


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