Oui, c’est un film de parti pris et Bernard-Henri Lévy ne s’en cache pas. Ce n’est même pas un témoignage. Ou plutôt, c’est davantage. C’est un cri. « Après Auschwitz, on disait : Nous ne savions pas. Cinquante ans plus tard, devant Sarajevo, on dit : Nous ne comprenons pas. Eh bien, nous avons voulu comprendre », explique l’auteur. En fait, il s’agit moins de comprendre que de combattre, de dénoncer, de pourfendre. Combattre avec les Bosniaques, dénoncer la lâcheté des gouvernants occidentaux, pourfendre les Serbes.
Oui, le commentaire, si beau qu’il soit, a une omniprésence qui personnalise cette œuvre et la grandiloquence finit par nuire à l’efficacité. On voit peu BHL, le plus médiatique des intellectuels, et c’est bien. On l’entend un peu trop.
Mais il reste l’essentiel. L’essentiel, ce sont les images terribles de cette guerre, les corps déchiquetés, la terreur répandue par les tireurs embusqués qui s’acharnent de loin, invisibles, sur ceux qu’ils ont déjà cloués au sol. C’est le cynisme des propos échangés par les attaquants serbes se désignant les cibles humaines.
L’essentiel, c’est la peur, la douleur et la dignité d’une population martyre. L’essentiel, c’est de rappeler face au « nettoyage ethnique » que Sarajevo était devenue au fil des siècles une « seconde Jérusalem », « le seul endroit au monde où, à part Justement Jérusalem, et dans un périmètre si proche, se côtoient minarets et bulbes byzantins, clochers de cathédrales et synagogues ». L’essentiel est qu’une nouvelle fois, soit posée – même avec excès – la question : « Que fait l’Occident pendant ce temps ? À quoi pense-t-il ? »
Bernard-Henri Levy annonçait dimanche à « L’Heure de vérité », qu’une « liste pour Sarajevo » pourrait être constituée pour l’élection européenne. Tout parait se mélanger, la gloire littéraire et les arrière-pensées politiques. Mais ce qui est essentiel encore, c’est que, avec ou sans liste, la Bosnie soit au cœur du débat européen.
Il reste encore à faire un film pour vraiment comprendre. Il était bon qu’il y eût ce film-là pour réagir.
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