Vladimir Poutine aurait déjà basculé dans « univers parallèle », a lancé sur LCI dans « L’Interview Politique » le philosophe et écrivain Bernard-Henri Lévy. Dans une allocution lundi soir, le dirigeant russe a reconnu l’indépendance de régions séparatistes prorusses dans l’Est ukrainien, mais aussi accusé les pays occidentaux de menacer son pays en dénonçant une fois de plus les élargissements successifs de l’Otan. Et selon lui, l’entrée de l’Ukraine dans l’Alliance atlantique serait « une question de temps », les États-Unis pouvant déployer des armes offensives en territoire ukrainien. Cette hostilité des pays occidentaux à l’égard de Moscou « est encore un mensonge », a réagi l’ancien journaliste.
Après 1989 et la chute du mur de Berlin, les Occidentaux et l’Otan « n’ont cessé » d’offrir au gouvernement russe « des alliances, des partenariats pour la paix, des remises à zéro des compteurs », a-t-il défendu. « Jamais dans l’histoire des empires un empire défait par ses peuples n’a été traité avec autant de mansuétude que la Russie par ses adversaires », a assuré Bernard Henri-Lévy. Si bien que le dirigeant russe « est un jumeau de Trump », qui a basculé dans « l’univers parallèle, la fake news ». « Il dit qu’il a sa vérité et les Occidentaux la leur », a déclaré le philosophe et écrivain.
Vladimir Poutine a également écorné au cours de son allocution la légitimité du régime ukrainien, estimant que « l’Ukraine contemporaine a été entièrement et totalement crée par la Russie bolchévique et communiste ». Là encore, le maître du Kremlin « parle comme Trump et vit dans un monde parallèle : l’Ukraine est un vrai pays bien plus ancien que la Russie », s’est irrité Bernard-Henri Lévy, qui a taxé Moscou de « révisionnisme historique ». « L’Ukraine existait alors que la Russie n’existait pas encore, […] mais elle a été colonisée par la Russie puis écrasée par elle », a-t-il encore appuyé, estimant que le lien entre les deux pays « est un lien de malheur, de malédiction et de souffrance ».
L’écrivain a par ailleurs appelé les Occidentaux à la plus grande fermeté face à Vladimir Poutine, d’autant que le dirigeant russe a menti à Emmanuel Macron, qui pourtant a fait preuve de « bonne volonté » et « qui est allé au bout de la négociation et de la menace ». « Le pire à prévoir, c’est la guerre, c’est l’entrée des chars russes dans les deux entités de Donetsk et Lougansk », s’est-il inquiété, estimant que le Kremlin compte « se servir de ces entités autoproclamées comme d’une base pour menacer l’Ukraine » en soutenant « des nervis, seigneurs de la guerre, dont le projet est de dépecer l’Ukraine ».
Face à l’ampleur de cette menace, « la seule chose qui peut arrêter Poutine, empêcher la guerre et sauver des vies, c’est de le bloquer en lui disant qui lui coûtera plus cher d’attaquer que de s’arrêter », a-t-il encore lancé, estimant que ces menaces de sanctions n’ont pas encore été prononcées. Il a notamment considéré que Joe Biden s’est montré trop indulgent vis-à-vis du pouvoir russe, après avoir décrété lundi soir des « sanctions confettis » à ses yeux et a fustigé « une phase tragique de repli ».
« Nous avons en face de nous l’un des tyrans les plus sans scrupules et cyniques de la planète », a-t-il lâché, appelant a contrario de la ligne occidentale actuelle à lui « opposer à leur force une force au moins équivalente » en armant l’Ukraine pour l’aider à se défendre. « Vladimir Poutine a donné hier la preuve que son problème n’est pas l’OTAN à ses frontières mais l’Ukraine en tant que telle, qui pour lui ne doit pas exister et est un pays fantoche », a déploré l’écrivain.
Ceux qui doivent aider l’Ukraine sont « ceux qui partagent ses valeurs, c’est-à-dire les démocraties », à savoir l’OTAN, a-t-il estimé, se disant aussi en faveur « d’aides unilatérales », comme la livraison d’armes par des pays de leur propre initiative. Pour l’heure, les combattants des forces ukrainiennes avec qui il reste en contact suite à des reportages « sont désespérés, naufragés, ont le sentiment d’avoir été abandonnés ». « Ça, ça brise le cœur », a-t-il lancé.
Quant aux sanctions qu’a d’ores et déjà annoncé l’Union Européenne, Bernard-Henri Lévy espère qu’elles iront « très loin » face à un dirigeant dont le but est « de déstabiliser, casser l’Europe ». « Évidemment que les sanctions ne sont bien pour personne, mais le jour où on arrêtera les gazoducs Nord Stream 2 et Nord Stream 1, peut-être que l’on aura des problèmes pour se chauffer », et que l’Europe devra se tourner vers d’autres pays, « mais la Russie se verra amputée d’une part considérable de ses ressources », a-t-il prédit. Avant d’assurer : « Le dégât économique sera bien plus fort pour lui que pour nous ». Pour autant, l’écrivain a appelé à ne pas abandonner la diplomatie, qui ne consiste pas selon lui à « céder », mais à « parler fort et ferme à un dictateur qui n’entend que la force et la fermeté ». « Si l’Occident ne réagit pas, tout peut se passer : la destruction d’un grand pays souverain, l’Ukraine, une menace imminente qui suivra aussitôt sur les autres pays d’Europe que Poutine a dans son collimateur », a-t-il mis en garde. Selon lui, le dirigeant russe refuse de voir une démocratie émerger à ses frontières « pour ne pas donner d’idée à ses opposants », et « il hait l’Europe » qu’il considère responsable de la chute l’URSS. Et de conclure : « Tant qu’il sera vivant, il fera tout pour prendre sa revanche et renvoyer à l’Europe et la monnaie de sa pièce ».
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