Adolescent, il comptait le nombre de dimanches qui lui restait à vivre. À vingt ans, il tenait de ses maîtres que le roman était un genre condamné, et que les grands modèles littéraires comme Joyce, Céline ou Kafka étaient sans postérité possible. Est-ce cette double fascination des maîtres et de la mort qui l’a poussé à choisir comme thème de son second roman les derniers jours de Charles Baudelaire ? « C’est une des agonies des plus riches et les plus bouleversantes, dont on ne sait rien. Cet hôtel du Grand Miroir à Bruxelles est un lieu très étrange où je parie que se sont posées la plupart des grandes questions sur la littérature. BHL derrière le poète. Difficile pourtant d’imaginer personnalités plus différentes. L’un, star des médias, adulé ou détesté, jamais indifférent. L’autre qui meurt seul, exilé, incompris. « On écrit des romans pour se livrer ou pour se dérober. Je suis plus présent dans ce roman que je ne le suis dans tous mes autres livres depuis trente-neuf ans. En même temps, j’y suis sous un nombre de déguisements. En même temps, j’y suis derrière le microscope. » L’écrivain soumet les trente-cinq derniers jours du poète au « scalpel du roman ». Vaincu, Baudelaire analyse ses défaites. Tous les personnages de sa vie viennent témoigner, chacun dans son langage. Jeanne Duval intervient en tenant son journal. Les mêmes questions obsédantes reviennent : qu’est-ce que la littérature ? Affaire de don ou de travail ? Qu’est-ce qu’un écrivain ? Baudelaire perd l’usage de l’écriture et de la parole. Ironie du sort. « À mes yeux, c’est mon livre le plus accompli. Avec lui, j’ai le sentiment que je ferme une période de ma vie à tous égards. »

Scrupuleusement documenté, avec des élans bouleversants, Les Derniers jours de Charles Baudelaire tient plus souvent de l’essai que du roman. Vérité historique et littéraire oblige. C’est le seul reproche qu’on peut lui faire.


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