Une liste pour Sarajevo ? Bernard Kouchner y avait pensé, le premier, le 28 décembre 1993, avant de se retrouver en numéro 3 sur la liste conduite par Michel Rocard.
Bernard-Henri Lévy, lui, la reprend, avec retard. Invité, hier, de l’Heure de vérité, le philosophe, qui vient de terminer un film sur la guerre qui ravage la Bosnie (Bosna !), a annoncé qu’il envisageait de présenter une telle liste. Le professeur Léon Schwartenberg pourrait la conduire avec la présence, derrière lui, de l’amiral Antoine Sanguinetti et de plusieurs intellectuels, dont Marek Halter, André Glucksmann, Romain Goupil ou Daniel Rondeau.
« Il ne serait pas pensable que la question de la Bosnie ne soit pas au cœur du débat européen », a expliqué BHL en agrémentant ses propos de nombreux « si ». Avant de partir en croisade, sur le terrain électoral, il entend d’abord interroger les leaders des autres listes : « Si leurs réponses n’étaient pas satisfaisantes, si nous sentions qu’elles se dérobaient ou proféraient des promesses sans conséquence, alors, je crois qu’il faudra faire une telle liste », a-t-il assuré.
La réponse de Bernard Kouchner, qui se trouve pour l’instant au Rwanda pour dénoncer les massacres qui frappent les Tutsis, devrait satisfaire BHL. L’ancien président de Médecins du monde n’avait-il pas déclaré que « ce qui se passe en Bosnie est tellement grave pour l’Europe que l’on devrait s’en inspirer pour les européennes […]. La liste Sarajevo, je la propose à tout le monde. J’espère que ça allumera une lueur dans la tête des politiques. » Quelques jours plus tard, le 9 janvier, il cosignait avec Michel Rocard un article dans le Journal du dimanche, en reprenant la formule « tirer ou se tirer », pour dénoncer l’impuissance de la diplomatie européenne et de l’ONU contre les coups de force des Serbes. Puis, dans Libération, le 19 avril, il écrivait : « L’Europe qui se cherche a devant elle la meilleure occasion d’affirmer sa volonté : se battre pour ses valeurs devant ce que l’après-communisme constitue en fascisme rouge et noir. Il ne s’agit pas seulement d’aider l’Est, il s’agit de nous sauver nous-mêmes. »
L’ancien ministre de la Santé paraît bien être sur la même ligne que BHL qui voit dans ce conflit un remake de celui des antifascistes à Madrid pendant la guerre d’Espagne. Il est probable également que Dominique Baudis, le maire CDS de Toulouse qui conduit la liste de la majorité RPR-UDF, ne sera pas avare en mots de sympathies. D’Edouard Balladur à Valéry Giscard d’Estaing, en passant par Alain Juppé ou François Léotard, le dernier des chics n’est-il pas d’aller se faire filmer à Sarajevo.
Un grand raout est d’ailleurs organisé demain à la Mutualité sur le thème « Élections européennes : et la Bosnie ? » en présence de Dominique Baudis, Hélène Carrère d’Encausse, Bernard Tapie et Bernard Kouchner.
Quant aux méchantes langues, ils pourront toujours accuser le philosophe de se faire de la pub pour son dernier film Bosna ! : alors qu’avec une telle liste « symbolique », il ne cherche, assure-t-il, qu’à « témoigner ». Ce qui est déjà beaucoup.
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