En 1831, Alexis de Tocqueville, 25 ans, entame avec un ami un voyage de neuf mois pour expliquer les États-Unis aux Français. En 2004, Bernard-Henri Lévy, 57 ans, se met « sur les traces » de Tocqueville pour expliquer l’Amérique aux Américains. Et sort le 24 janvier American Vertigo, récit de ses tribulations, édité par Random House, déjà partiellement publié en feuilleton dans le magazine Atlantic Monthly.
Les traces de BHL ne se confondent pas avec celles de son prédécesseur. Tocqueville était allé jusqu’au Michigan à l’ouest, à la Nouvelle-Orléans au sud. BHL, lui, atteint la Californie et clôt son voyage avec Guantanamo. Tocqueville se déplaçait à cheval, en diligence et en bateau à vapeur. BHL a sillonné le pays, de juin 2004 à avril 2005, en voiture, avec chauffeur. « Je ne conduis pas, donc j’avais quelqu’un qui me conduisait, raconte-t-il. C’est un voyage qui s’est fait par la route, à quelques exceptions près comme Guantanamo ou un survol d’une grande partie de la frontière américano-mexicaine. Dans certaines circonstances, il m’arrivait d’avoir une interprète. » Une équipe de tournage le rejoint aux « étapes importantes » en vue d’un documentaire sur le voyage.
L’idée, comme pour Tocqueville, est de venir à la rencontre des Américains, célèbres ou non. L’attelage intrigue parfois, ou laisse indifférent. « Un visiteur excentrique échappe à l’attention », titrait le quotidien Detroit Free Press fin juillet 2004, décrivant l’auteur devant des usines abandonnées, « la chemise ouverte » et « ses longs cheveux au vent », tandis que quelqu’un filme sa promenade.
Pour les critiques, BHL est difficile à cerner. « Une sorte d’amalgame entre Susan Sontag et Warren Beatty », écrit Carl Swanson dans New York Magazine. Néanmoins, BHL a déjà réussi à se faire une petite place dans les médias américains, heureux de son « anti-antiaméricanisme » proclamé, et intrigués par ses positions sur la guerre en Irak ou la situation en Israël. « Je connais bien l’antiaméricanisme français parce que je l’ai combattu un millier de fois », écrit-il dans le New York Times en décembre 2004.
L’Amérique aimera-t-elle BHL ? Random House en fait le pari. Le livre fait l’objet d’un plan de communication exceptionnel pour un Français. « En termes de budget, il rentre dans la catégorie de Salman Rushdie, Robert Kaplan ou Norman Mailer », explique Bill Murphy, le responsable éditorial.
Dès la semaine prochaine, BHL entame un second voyage aux États-Unis, dans dix villes, pour promouvoir le livre. Première étape, New York, où se succéderont manifestations mondaines et culturelles : soirée organisée par Diane von Furstenberg (une amie), conférence à la Bibliothèque publique, signature dans une grande librairie, soirée au consulat en présence de l’ambassadeur de France… « C’est un livre que j’ai écrit pour un lecteur américain plutôt que pour un lecteur français, explique BHL. L’initiative venant des États-Unis, c’était bien que le public américain l’ait en premier. »
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