C’est un livre dont Bernard-Henri Lévy ne sortira pas indemne. Le lecteur non plus. Pris aux tripes par l’assassinat de Daniel Pearl, BHL nous balance 500 pages en pleine figure. On est un peu sonné en refermant la jaquette noire de Qui a tué Daniel Pearl ?

La philosophe va, certes, énerver les puristes de l’investigation. Car c’est le genre « romanquête » que revendique BHL. Il contextualise, imagine, lorsque les faits se dérobent. Peu importe, au final. Le coup de poing n’est pas moins violent. BHL s’est rendu deux fois à Karachi où Pearl a été décapité. On le suit, hésitant, parfois effrayé dans cette mégalopole de quatorze millions d’âmes. Bernard-Henri Lévy ? Non, ce nom-là ne dit rien au Pakistanais moyen. Tant mieux. BHL peut ainsi discuter avec les témoins se glisser dans le nid de vipères islamistes comme la mosquée de Binori Town, fief taliban. Il faut rendre grâce à BHL d’avoir ouvert un espace de réflexion réservé aux experts de la géopolitique. Patiné, et comme légitimé par ses combats pour la survie des musulmans de Bosnie et en Afghanistan, le philosophe ose dire le danger de l’islamisme sans jamais le confondre avec la religion dont les fanatiques sanguinaires se revendiquent scandaleusement. Puis, par un retour inattendu au cœur de l’Europe, à Londres, BHL lève un autre coin du voile. Il choquera sans doute la famille Pearl en consacrant un long chapitre à l’assassin de Daniel Pearl, Omar Sheikh. Que Mr. Et Mrs. Pearl nous pardonnent, mais en découvrant le destin de ce garçon de bonne famille, élevé dans les meilleurs collèges, une évidence saute aux yeux : Omar n’est pas moins que Daniel le produit de l’Occident. Quelle terrible maladie traduit donc cette dérive poussée au centre de nos démocraties ? C’est une question centrale du livre. Pour Pearl et pour BHL, c’est un défi majeur qui s’ouvre, qu’on peut traduire par cette autre interrogation : d’où vient cette haine d’un genre nouveau qui menace le monde ?


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