Les textes de NTM choquent ? C’est que l’on a oublié ceux de Sartre et Foucault, dans la presse maoïste des années 70. Appels au meurtre des « bourgeois ». Patrons « pendus par les couilles ». CRS non pas « condamnés à mort », mais transformés en « SS ». Et nous n’avions pas, à l’époque, l’alibi du rap et des banlieues !
La France soutient la candidature de Boutros-Ghali à sa propre succession à la tête de l’Onu. Au choix : aveuglement politique ou acharnement thérapeutique. Qu’en pensent les survivants de Bosnie ?
Le plus mystérieux chez Juppé : qu’il ne fasse rien de son impopularité. Un Français sur cinq seulement pour le soutenir ? Le record d’Édith Cresson pulvérisé ? Ce serait l’occasion, j’imagine, de dire : « battu pour battu, voici les grandes réformes que j’entreprends, les grands chantiers d’avenir sur lesquels je choisis de finir ». Au lieu de quoi, cette morne survie. Cette singulière série de reculs. La prudence de Balladur, tant daubée par les chiraquiens quand il était au faîte des sondages – et que, pour le coup, rien n’explique.
Interrogée sur l’hommage rendu à Marek Halter par les libraires de Toulon, Mme Roze, prix Goncourt 1996, y voit une « provocation ». Ensuite, bien sûr, elle se rétracte. Elle regrette son fâcheux lapsus. Mais demeure la première impression : se mettre dans la peau des fascistes au pouvoir, imaginer leurs réactions et, par avance, s’y conformer, entrer, en un mot, dans leurs raisons et faire comme si ces raisons étaient raisonnables, c’est le début de l’esprit collabo.
L’affaire NTM encore. Si le « malaise » des banlieues suffit à justifier la violence verbale du groupe ? Non, bien entendu. Car autant excuser à ce compte, et en vertu du même malaise, la violence des lepénistes contre les institutions républicaines. N’empêche. Des artistes emprisonnés, une interdiction de chanter, l’arsenal de la répression la plus lourde mobilisé contre le plus populaire des groupes rap, ce serait, si la décision se voyait confirmée, un autre dérapage, plus redoutable encore, et qui ne pourrait que redoubler ses effets les plus pernicieux. Douste-Blazy et Toubon l’ont compris. Et ils ont sauvé, en le comprenant, ce qui restait à sauver : outre leur honneur, la responsabilité de l’État de droit.
Réhabilitation du colonel de La Rocque et de ses Croix-de-Feu. Signe des temps. Confusionnisme intellectuel. Car on mélange, ce faisant, deux choses. Que la plus active, en effet, des ligues de l’entre-deux-guerres n’ait pas été nazie au sens, par exemple, de l’Allemagne, que son chef se soit bien conduit face à l’occupant et qu’il ait fini dans la Résistance avant d’être déporté, c’est parfaitement exact, nul ne l’a jamais sérieusement nié et Jacques Nobécourt, dans son livre (Fayard), a raison de le rappeler. Mais que ce problème de conduite règle celui de l’idéologie, que la biographie du chef des Croix-de-Feu autorise à ne pas entendre la réalité de son discours, que l’on passe sous silence, autrement dit, son antiparlementarisme virulent, sa haine de la démocratie et des lumières, ses appels incessants à la voix de la rue contre celle du pays légal, que l’on refuse de prendre en compte la « nausée » de La Rocque face à une « décadence » dont seule une « révolution nationale » pouvait, selon lui, remonter le cours, que l’on efface du même coup, le « maréchalisme patriote » qui fut le sien dans les premiers temps de Vichy et qu’évoque Zeev Sternhell dans Le Monde des livres de la semaine dernière, voilà qui devient contestable et, dans le climat du moment, périlleux. Révisionnisme soft. Toujours le même refus de voir, en ce qu’elle a de spécifique, la tradition fasciste française.
Fidel Castro au Vatican : on est troublé mais on comprend (le pape a bien reçu Kurt Waldheim – pourquoi ne recevrait-il pas le vieux dictateur ?). Le même Fidel chez Agnelli : on est également stupéfait, mais on comprend, cette fois, beaucoup moins (sauf à rappeler le mot de Lénine sur ces capitalistes qui, par cynisme, vendraient à leurs ennemis jusqu’à la corde pour les pendre). L’indignation passée, surgit l’autre question – romanesque : laquelle des deux rencontres a-t-elle été la plus étrange, la plus improbable, la plus fertile en malentendus ?
Un film sur les insectes, interprété par des insectes. Pas encore vu. Mais lu, dans Télérama, ces déclarations des deux auteurs : « ces êtres étrangers sont faits de la même pâte que nous » ; il y a, entre eux et nous, « un pont qui peut s’établir » ; nous « partageons avec eux une sorte de destin commun ». Le film est peut-être beau. Mais le propos est débile. Mépris du genre humain, ou haine du cinéma ?
Les réfugiés hutus rentrent au Rwanda. Stupeur dans les chancelleries. Désarroi dans le barnum humanitaire. Les médias du monde entier sidérés par la nouvelle. C’est l’Histoire qui, pour une fois, va plus vite que l’information – c’est CNN prise à revers et la revanche du réel sur le virtuel.
Les gens qui parlent « au nom » d’une génération ? Aristote, dans sa « Physique » : « génération » égale « corruption ».
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