La Tunisie est un pays doux, aimable, ouvert et accueillant, comme il y en a peu au Sud de la Méditerranée. C’est une de ses plus belles traditions depuis toujours. On ne demande pas aux millions de touristes, aux hommes d’affaires, à quiconque, qui se rendent chaque année au pays de Bourguiba, leur origine, leur opinion, pas plus que les motifs de leur visite.
Nous nous sommes rendus, BHL et moi-même, à Tunis cette fin de semaine rencontrer des amis libyens, les uns résidant sur place, quelques-uns venus spécialement de Tripoli, dont le président de la Commission nationale pour la réconciliation, afin de débattre de la situation de la Libye au bord de la guerre civile. La rédaction d’un manifeste public appelant à la réconciliation entre tous les Libyens était l’un des buts de cette réunion.


BHL insulté à son arrivée à Tunis


Prévenus depuis notre embarquement à Orly, une poignée de manifestants, criant des slogans antisémites contre BHL, le traitant d’assassin, attendaient à notre arrivée à l’aéroport de Tunis. Ils en furent pour leurs frais. A l’hôtel, un homme, le lendemain, l’agressa physiquement. Il fut maîtrisé et arrêté par la police.
Plusieurs sites complotistes relayèrent ces imprécations, certains appelant carrément au meurtre du « sioniste » BHL venu pour les uns rencontrer l’islamiste Gannouchi, patron d’Ennhada, pour les autres mettre la Tunisie à feu et à sang, et tous appelant à son expulsion ! Les mêmes, avocats en tête, engagèrent une action en ce sens auprès des autorités tunisiennes. Des manifestations étaient annoncées. Une convocation devant la justice, pour aujourd’hui, dimanche, fut même portée à Bernard-Henri Lévy, en mains propres, à notre hôtel. Kafka à Tunis !


« Le printemps tunisien continue »


La Tunisie est un pays ami et un pays démocratique. Après avoir renversé il y a trois ans Ben Ali et ouvert l’ère des Printemps arabes, les Tunisiens ont renvoyé les islamistes d’Ennhada dans l’opposition, aux dernières élections. Le Printemps tunisien continue. Et, dans le même temps, une partie de l’Opinion, cédant à la pression de sa frange la plus extrême, vient signifier à un ami de la Tunisie, qui prit fait et cause dès le début pour la révolution tunisienne il y a trois ans, qu’il est « indésirable » !
Ce tsunami de bêtise sans précédent, ce déchaînement de conspirationnisme, sont un affront aux valeurs de la démocratie tunisienne et aux meilleures traditions de ce pays ami.

On sait que la démocratie et la liberté d’expression, font, au sortir de la nuit des tyrannies, ressortir tout un refoulé, une boue mal éteinte. C’est le prix à payer pour le droit de tous à la liberté, y compris ses ennemis.
La Tunisie, terre traditionnelle de tolérance et de compromis, passe à son tour par là. C’est un nouveau défi pour les démocrates tunisiens.
Les mêmes combats se mènent aujourd’hui partout. A Tunis comme à Paris.


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