Des ruines. Un océan de ruines. Mais, aussi, du cœur et de l’âme. « Ce que peu de gens ont. Nous, nous l’avons. Et qui que nous soyons, ici, nous serons là », déclare, face caméra, une habitante. Ultradéterminée, comme la plupart des personnages réels de ce film, dont le commandant Ilya Samoïlenko, 27 ans, un crochet terminant son bras gauche amputé, filmé depuis le labyrinthe souterrain de l’usine Azovstal dans l’un de ses derniers moments de liberté.
Depuis la reddition surprise du dernier carré de ces hoplites de l’Est, tenant Marioupol comme Léonidas et les siens, les Thermopyles, plus personne n’a de nouvelles. En témoigne, la voix étranglée par l’émotion, tee-shirt noir #FreeAzovDefenders sur les épaules, la femme du guerrier venue présenter avec trois autres mères ou femmes de soldats, le poignant film de notre éditorialiste Bernard-Henri Lévy.
Poutine, l’homme « qui n’a pas d’yeux »
Les images du conflit ukrainien ne manquent pas, mais celles-ci, on ne les avait pas vues. Tournées au plus près des combats, au plus près des atrocités foulant aux pieds toutes les conventions. Au plus près de l’héroïsme, aussi, des résistants à Poutine, l’homme « qui n’a pas d’yeux », selon l’expression utilisée par Zelensky dans un entretien sidérant de franchise et d’humanité avec l’écrivain-philosophe et cinéaste.
Pourquoi l’Ukraine : c’est la fausse question, d’ailleurs sans point d’interrogation, que pose le titre du film, objet politique, exhortation à agir, tant les « parce que » pleuvent comme les tirs russes sur les façades des immeubles de Borodyanka ou de Mykolaïv. « Parce que » l’Europe, surtout, l’obsession de BHL, qui revient sur l’Épiphanie de Maidan, et la conviction, instinctive, que le maître du Kremlin n’allait pas passer sur cet affront démocratique. « Parce que » la liberté, aussi, chantée par une combattante a capella, dans son refuge, Massada d’aujourd’hui tragiquement éclairé par les bombes au phosphore. « Nous ne voulons pas la gloire. Mieux vaut mourir au combat que vivre en esclave. »
Détour par les camps d’entraînement de la mystérieuse « mission Mozart », où l’on échafaude des manœuvres avec des soldats en plastique, et puis par Babi Yar, le site mémoire où reposent 34 000 Juifs massacrés lors de la Shoah par balles, sanctuaire lui aussi bombardé par les armées de Poutine – qui faut-il vraiment dénazifier ? – et mise au point salutaire sur la question de l’antisémitisme en Ukraine. Des ruines. Un océan de ruines. Mais malgré tout, dans la détermination des regards ukrainiens, quelques lueurs d’espoir ?
Réseaux sociaux officiels