Le 15 décembre 2023, Olivier Nora, Président-Directeur Général de Grasset, et Bernard-Henri Lévy, auteur-maison, et membre du Conseil d’administration, ont invité, dans les locaux de la rue des Saints-Pères, les personnels, les auteurs et les amis de la Maison à fêter le cinquantième anniversaire d’une fidélité éditoriale devenue rare à l’heure du Mercato généralisé. Les deux hommes ont prononcé, à cette occasion, deux courtes allocutions dont La Règle du Jeu publie la transcription. Le moment fut nostalgique et joyeux. Marqué au sceau de l’amour de la littérature et de l’amitié. Voici.

Le discours d’Olivier Nora, Président-Directeur Général de Grasset et éditeur de Bernard-Henri Lévy

Je suis heureux et ému d’accueillir à mon tour Bernard-Henri, vingt-trois ans après qu’il m’a accueilli, lui, si généreusement entre ces murs, lors de mon arrivée chez Grasset en 2000.

L’honnêteté m’oblige à dire que je n’étais pas, à l’époque, son premier choix pour succéder à Jean-Claude Fasquelle. Non par hostilité à ma personne, mais parce que l’amitié, la fidélité et la proximité générationnelle le portaient tout naturellement vers d’autres profils.

Néanmoins, voici qu’à ce jeune homme qui, à priori, n’« était pas son genre », et alors qu’il était évidemment sollicité de toutes parts, il a choisi de tendre la main et de donner sa chance. Il m’a confié une vingtaine de ses livres, du Siècle de Sartre en 2000 à Sur la route des hommes sans nom en 2021 en passant par son si prophétique L’empire et les cinq rois en 2018. (Par parenthèse, je conseille à tous ceux qui ne l’ont pas lu ce dernier titre de le lire, et à tous ceux qui l’ont lu de le relire, tant l’irruption tragique de l’Histoire partout autour de nous confirme la prescience des analyses qui y sont développées sur la reconstitution des empires illibéraux). Outre ses propres ouvrages, il y a eu aussi bien sûr les si nombreux titres qu’il a publiés dans sa collection « Figures » et les innombrables conseils qu’il m’a prodigués.

C’est ainsi que de jour en jour, d’année en année, de texte en texte, de proximité en complicité, travaillant ensemble, apprenant à nous connaître, nous avons noué ce qui, pour ma part, est devenu une amitié précieuse.

Nous sommes tous habitués à côtoyer des êtres qui exhibent leurs qualités et scellent leurs défauts, et voilà que le temps m’a fait découvrir ce specimen singulier qui fait tout l’inverse, montrant tout ce qui a pu concourir à l’édification de sa caricature publique et cachant tout ce qui le rendrait irrésistible à ceux qui n’ont pas eu la chance d’y avoir accès.

C’est qu’il y a deux manières de se rendre illisible : par rétention de signes ou prolifération de signes contradictoires. Les premiers sont invisibles, les seconds survisibles. Les premiers discrets, retenus, contractés ; les seconds vocaux, débridés, expansifs. Bernard brouille les pistes : pudique à l’extrême pour ce qui relève de sa vie intérieure profonde et de sa générosité sans témoin, démonstratif pour ce qui relève de ses combats publics.

Il mène plusieurs vies en parallèle, avec un don d’ubiquité qui fascine. Son patronyme même semble prédestiné, comme une sorte de confirmation performative du cratylisme. Lévy ? Les Vies, s’amuse-t-il à dire en langage lacanien. Cet homme est pour moi une piscine à débordement. J’admire et je lui envie son énergie vitale, son engagement intact, sa fougue inentamée, sa jeunesse éternelle.

Penser qu’il m’a précédé ici durant vingt-sept ans est un peu vertigineux. C’est donc à mon si jeune grand aîné que je cède la parole pour qu’il nous rappelle quelques souvenirs de cette Maison des vivants avec laquelle nous fêtons ce soir ses noces d’or.

Le réponse de Bernard-Henri Lévy

Merci, cher Olivier. 
Je suis, moi aussi, très ému. 
Et c’est un peu vertigineux de se dire que je suis entré dans cette maison, que j’ai monté ces escaliers, pour la première fois, il y a très exactement cinquante ans. 

Oui, cinquante ans pile, quasi jour pour jour, cela fait cinquante ans que j’ai été accueilli ici, en haut de cet escalier où je viens de vous accueillir tous, par une jeune femme, blonde à l’époque, eh oui ! assez svelte, qui s’appelait Françoise Verny. 

On était en 1973. Elle m’attendait exactement là, à cet endroit précis où je me tiens ce soir, cette figure légendaire de l’édition française. Si vous voulez, vraiment, des souvenirs de la maison des vivants, sachez qu’elle avait une caractéristique : cette éditrice hors pair, dotée d’un radar infaillible et qui ne se trompait guère sur le futur des écrivains et sur la qualité de leurs textes, ne lisait jamais vraiment les manuscrits qu’elle recevait. Une autre : cette stratège de haut vol que François Mauriac appelait Miss Ficelle avait pour habitude d’organiser, chez elle, rue de Naples, des dîners très courus où elle conviait des cardinaux, des futurs présidents de la République, des premiers ministres en exercice, des dirigeants du Parti communiste français, des grands écrivains comme Louis Aragon, d’autres, mais elle n’y assistait pas, jamais, car elle était saoule tous les soirs et, quelques minutes avant de passer à table, s’effondrait toujours et devait être couchée. 

A l’époque il y avait donc, elle, Françoise. Mais il y avait aussi Jean-Claude Fasquelle qui occupait le bureau qui est aujourd’hui, celui d’Olivier. Il parlait, à l’époque. Il était même assez volubile. Il n’avait pas encore inventé ses fameux silences fasquelliens qui ont fait sa légende mais dont j’ai toujours pensé que la fonction secrète était de laisser parler les écrivains. Son oncle, qui s’appelait Francis Fabre, et qui était une sorte de Rodolphe Saadé du moment, était venu dire au patron en titre, Bernard Privat : « surtout, ne donnez jamais les rênes de votre Maison à mon neveu, c’est un bon à rien ! ». Mais bon. C’est lui, Jean-Claude, qui a été l’éditeur de Bodard, Garcia Marquez, Umberto Eco, tant d’autres. Et c’est lui qui a fait de cette maison l’une des plus grandes, et des plus belles, du paysage éditorial français. 

Mais il y avait un troisième personnage. C’était le patron, donc, à l’époque de mon arrivée. Il occupait, là, derrière moi, le bureau qui est aujourd’hui celui de Christophe Bataille. Et il s’appelait Bernard Privat. Il était une singulière personne, lui aussi. Le neveu de Bernard Grasset. L’héritier, forcément, de sa culture des « coups » et de ce qu’il appelait encore « la réclame ». Sauf qu’il était terrorisé par le succès. Absolument terrorisé. Il était, lui-même, un écrivain secret qui mettait son point d’honneur, primo à publier chez Gallimard et, secundo, à ne jamais passer à la télévision, donner d’interview, etc. Alors, un jour, l’auteur – moi – d’un worst seller, chez Maspero, sur le Bangladesh, lui donne La Barbarie à visage humain qui se vend comme des petits pains. J’entre dans son bureau, pensant recueillir quelques lauriers et compliments. Et voilà Bernard qui était, par ailleurs, infiniment plus proche de gens comme Léautaud, Fargue ou Joseph Delteil que des philosophes qui, tels Michel Foucault, Jacques Lacan, Louis Althusser, m’impressionnaient à l’époque et dont j’étais censé introduire l’esprit dans la maison, voilà Bernard, donc, qui prend son air d’oisillon effarouché des mauvais jours et me dit simplement : « ah ! écoute… je suis désolé… 100 000 exemplaires ? 200 000 ? Et 10 000 réassorts par jour ? Mon Dieu… Où va-t-on ! C’est vrai, mon coco, que tu méritais quand même mieux !». 

C’était ça, Grasset, en ce temps-là. 

On était, quand on y réfléchit bien, à une encablure de la Guerre et de la Libération – et à deux encablures de l’Affaire Dreyfus. 

Je veux dire qu’entre la Maison où je suis entré et la Seconde Guerre Mondiale, la collaboration, le pétainisme, toutes ces horreurs auxquelles j’allais bientôt consacrer L’Idéologie française, il y avait le même laps de temps qu’entre aujourd’hui et, mettons, le 11 Septembre. 

Et, entre nous et l’Affaire Dreyfus qui, honnêtement, nous semble, tous, je crois, aujourd’hui, de la préhistoire, il y avait le même temps qu’entre aujourd’hui et la Seconde Guerre Mondiale – on était à un battement de cils, autrement dit, de scènes très importantes de l’Histoire de France ; elles nous étaient quasi contemporaines ; on avait le sentiment de les tutoyer ; alors qu’elles nous apparaissent, nous, ce soir relever d’un passé très ancien… 

Alors Grasset se débattait dans tout ça. 

C’était une maison étrange qui avait un pied chez les Hussards et un autre chez les Maos, qui voulait bien m’écouter quand je lui amenais les marxistes italiens tendance Galvano della Volpe mais qui pensait que Jacques Chardonne était quand même plus sérieux. 

C’était une maison où il y avait des comités de lecture qui peuvent paraître, rétrospectivement, assez surréalistes. Ainsi, ce jour où François Nourrissier proposa de rééditer les Cahiers de Maurice Barrès qui venaient de tomber dans le domaine public. Jean-Claude Fasquelle qui n’oubliait jamais qu’il était, lui, le petit-fils et l’héritier de l’éditeur de Zola et que Zola et Barrès s’étaient durement affrontés au temps de l’affaire Dreyfus, observe un long silence, puis tranche. Il le fait avec le plus grand sérieux. Il le fait comme on ferait, de nos jours, pour un auteur qui nous aurait quittés pour Gallimard et voudrait revenir chez Grasset, ou l’inverse. Et il tranche, donc, sans une ombre d’humour ou d’ironie : « ah non ! Barrès a quitté la maison par la porte il n’y rentrera pas par la fenêtre. » 

Donc une Maison très bizarre. Comme, d’ailleurs, Gallimard à la même époque. Mais à qui je dois de m’avoir laissé une liberté de mouvement extraordinaire. Le tout premier livre de ma carrière d’éditeur, son auteur est là, c’est Michel Field, avec L’école dans la rue, qui était le manifeste de la jeunesse insoumise d’alors et qui avait une autre allure que les insoumissions d’aujourd’hui… 

Les premiers textes du néo féminisme, La cause des femmes de Gisèle Halimi, puisParoles de femmes d’Annie Leclerc… C’est là aussi, dans mes collections qu’ils sont parus, avec la bénédiction des Saints Pères. 

Et puis il y avait tous mes copains de la rue d’Ulm à qui je me suis mis à distribuer des contrats comme des billets de loterie… Certains sont ici, ce soir, comme Philippe Roger ou Jean-Luc Marion… D’autres ont disparu… Je ne sais pas très bien ce que pensait vraiment Bernard Privat de leurs textes, ou qu’est-ce qu’il y entendait… Mais enfin, tout ça a vu le jour dans Grasset. Et j’ai, vis-à-vis de ce temps-là, de cette maison du monde d’hier, une dette impayable. 

Parce que, après, il y a eu les « Nouveaux philosophes ». André Glucksmann – je crois que Raphaël est là, ou était là… – Christian Jambet… Jean-Paul Dollé… Moment extravagant, quand on y pense ! C’était une époque où on ne devenait pas célèbre après une conversation comme à l’époque de Byron. Mais on avait la couverture de Time, et votre bobine faisait le tour du monde, après cinq minutes chez Bernard Pivot…. 

N’en déplaise aux complotistes qui voient des manipulations derrière les grands mouvements d’idées, cette histoire des Nouveaux philosophes était à la fois absolument essentielle, remaniant le paysage idéologique pour les décennies à venir et complètement contingente, absolument pas calculée, puisque mon propre livre, qui fut aussi le manifeste du mouvement, La Barbarie à visage humain, je l’ai écrit par amour pour une femme, Sylvie, la future maman d’Antonin… J’ai encore, dans mes archives, le bon de mise en fabrication de ce livre qui allait se vendre à des centaines et des centaines de milliers d’exemplaires : 2000/2200. Ce qui voulait dire 2000 copies chez les libraires et 200 pour le Service de Presse… 

Voilà donc la Maison, avant Internet, avant Tik Tok, avant tout ça, qui m’a laissé, les yeux fermés, publier tous ces livres… Et puis, est arrivé, ce jeune homme, Olivier Nora. 

Contrairement à ce qu’il a dit, il n’était pas mon « deuxième candidat ». C’est plus compliqué que ça. Car vous aviez, cher Olivier, une immense vertu à mes yeux. Vous aviez été, avant d’entrer chez Grasset, le patron de Calmann-Lévy et c’est là que vous avez appris son métier d’éditrice à l’un des êtres qui me sont les plus chers au monde : ma fille, Justine Lévy, par ailleurs romancière magnifique. Ne serait-ce que pour cela, je vous ai aimé d’emblée, cher Olivier.

Et puis on a appris à se connaître. Vous avez introduit dans la maison une culture assez différente de celle que j’ai évoquée tout à l’heure. Les manuscrits, aujourd’hui, sont lus avec grande attention. Olivier est d’ailleurs devenu, dès mon Siècle de Sartre, après ma femme, Arielle Dombasle, avec Jean-Paul Enthoven, avec Gilles Hertzog, le premier lecteur de mes textes. Et j’ai trouvé en Olivier, puisqu’on se dit, ce soir, des choses qu’on ne s’est jamais dites, l’un de mes amis les plus précieux. On a, la plupart du temps, les mêmes réflexes et, par conséquent, les mêmes convictions. Par les temps qui courent c’est peu fréquent. Nous ne sommes pas si nombreux à avoir, face à un texte, un événement, n’importe, ces réflexes-là. Mon Dieu, comme c’est reposant ! Et comme c’est précieux ! Merci, Olivier… 

Alors voilà. Le monde d’hier a disparu. Claude Dalla Torre… Monique Mayaud… Jean Fournier… Tous ces noms-là ne disent sûrement rien à ceux qui sont ici, ce soir… Peut-être Yves Berger, oui… Le grand artisan des prix littéraires… Celui qui traitait deux des jurés Goncourt que Jean-Claude Fasquelle invitait, chaque année, fin août, dans son auberge espagnole de Cadaquès… Ils allaient, avant l’aube, poser des oursins en face de la maison, sur un rocher pas très loin de la côte… Les deux jurés se réveillaient. Ils s’équipaient de leur masque et de leur tuba. Ils mettaient leur boxer short le plus tendance. Et Yves et Jean-Claude les emmenaient sur la barcasse de la maison, genre « on ne sait pas bien où on va… on hésite… tiens, pourquoi pas là, ce rocher… ou celui-là… » La barcasse s’arrêtait… Les jurés plongeaient… Et, au bout de trois minutes, ils surgissaient surexcités, l’épuisette pleine de beaux oursins bien ronds… Et ils rentraient à Paris d’une humeur de rêve qui ne pouvait pas nuire à leurs délibérations à venir… 

Enfin, pas toujours ! Parce qu’il y a tout de même un de ces deux jurés… Allez ! On ne va pas dire son nom…. Mais sachez, pour vous mettre sur la piste, qu’il était Prix Lénine et Prix Staline de Littérature… Et voilà que, un beau jour, Grasset publie mes Derniers Jours de Charles Baudelaire… Il y avait, dans le livre, une phrase où j’osais dire que Robespierre avait peut-être inventé La Terreur… Et, malgré les oursins, malgré la pêche miraculeuse, malgré l’humeur de rose, il a eu, au moment de voter, cette formule historique qui l’a fait déroger, pour la première fois en trente ans, à son usage : « Entre ma maison, et mon parti, je choisis mon parti »… C’était bien ma chance !

Voilà. Il y a eu beaucoup de disparus. Peu de survivants, à part Denis qui est ici. Jean-Paul qui, hélas, n’est pas là, il est au bout du monde, je me demande bien pourquoi et il me manque. Et puis ma chère Laurence entrée dans la Maison dix ans après moi et qui m’a suivi jusqu’aujourd’hui. Mais il y a ceux qui sont entrés dans ma vie, depuis. Christophe Bataille, qui n’est franchement pas un mauvais lecteur non plus. Ma très chère et très tendre Elodie, sans laquelle je n’imagine pas publier un livre. Agnès Nivière, à qui j’inflige des tortures à chaque sortie de livre avec ma manie de corriger jusqu’à la seconde précédant le lancement de l’impression. Mais croyez-moi, chère Agnès : autrefois, dans le monde d’hier, avant l’époque des claviers, des traitements de textes et de tous ces machins-là, quand tout se faisait à la main, je faisais pareil et c’était encore plus compliqué ! 

La maison, donc, s’est métamorphosée. Mais elle reste, pour moi, « la » Maison. C’est comme la galère de Thésée dont les Grecs disaient qu’elle restait la galère de Thésée alors que chaque mât, chaque rame, chaque voile, chaque planche avaient, avec le temps, été remplacés et qu’il ne restait rien de la galère d’origine. Chez Grasset, aussi, tout a changé. Sauf les murs, grâce au ciel. Sauf, peut-être, une habitude qui fait les grands éditeurs de préférer les auteurs à soi, et les livres aux auteurs. Mais le résultat est là. Je dois faire partie des très rares écrivains qui n’ont, eux non plus, pas bougé. J’ai publié une quarantaine de livres. Mais, à part une infidélité avec Olivier Orban, et encore ! je soupçonne Jean-Claude Fasquelle d’avoir fait ce qu’on appelait, dans le temps, un compte à demi, je les ai tous publiés chez Grasset. J’ai souvent changé de maison, je veux dire de maison avec une minuscule, d’appartement. J’ai quelquefois changé de vie. Mais il y a un point fixe qui est là depuis le premier jour où j’ai gravi cet escalier qui m’était une sorte d’Olympe : c’est ma fidélité à la Rue des Saints-Pères. Au grand dam de « la concurrence » comme disait Edmonde Charles-Roux !

Il y a un mot que j’aime bien dans les Souvenirs d’enfance et de jeunesse de Renan. Il y a trois choses importantes, disait-il, dans la vie d’un écrivain. Trois fidélités capitales. Être fidèle à une idée. Être fidèle à quelques amis. Et être fidèle à une maison d’édition – dans son cas, c’était Calmann-Lévy. Eh bien ça tombe bien. Car mes idées, c’est d’ici, depuis cette base, que je les défends depuis toujours et je ne me vois pas les défendre, demain, sans vous, Olivier, sans Christophe, sans Jean-Paul, sans Elodie. Et puis mes amis, mes plus chers amis, certains sont là, dans ces murs – et les autres, la plupart des autres, ont répondu à notre invitation et sont donc, ce soir, ici. 


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