L’inauguration à Paris du buste du grand poète ukrainien Tarass Chevtchenko (1814-1861), dû au sculpteur officiel soviétique Lyssenko, a donné lieu, mercredi 24 mai, en fin de matinée, dans le square du sixième arrondissement qui porte le nom du poète, à quelques scènes étonnantes. L’ambassadeur d’U.R.S.S., M. Stepan Tchervonenko, dut écouter M. Edouard Frédéric-Dupont, adjoint au maire de Paris et connu pour son anticommunisme, faire l’éloge de l’Ukraine, « ce grand pays » et rappeler les persécutions dont Chevtchenko fut victime de la part du pouvoir central, qui était alors celui des tsars.
« La langue n’est pas seulement un instrument, elle témoigne d’un destin », affirma M. Frédéric-Dupont. Le député le Paris (app. R.P.R.) dut cependant entendre à son tour des manifestants ukrainiens antisoviétiques, refoulés par les policiers parisiens, s’écrier : « Chirac complice ! »
L’ambassadeur d’U.R.S.S. déclare sans rire que Tarass Chevtchenko était certes « un grand poète ukrainien », mais que son œuvre « était profondément internationale » et « progressiste ». M. Léonid Pliouchtch a indiqué dans ces colonnes (Le Monde du 24 mai) que cette œuvre était cependant censurée en U.R.S.S.
Cent cinquante Ukrainiens de Paris, accompagnés par MM. Léonid Pliouchtch et Bernard-Henri Lévy, étaient venus protester contre le « cynisme » de cet hommage rendu officiellement par l’U.R.S.S., à travers Chevtchenko, à une culture et à un peuple toujours persécutés.
Maintenus par les policiers parisiens à distance du square, les manifestants scandaient : « U.R.S.S. assassin ! », « K.G.B. hors de France ! », « Tarass Chevtchenko opprimé par les tsars, Valentin Moroz opprimé par Brejnev ! », « Halte à la russification en Ukraine ! »
Une personnalité inconnue des Ukrainiens de Paris, M. Osnach, présenté tantôt comme le représentant de l’« association pour les Ukrainiens de l’étranger », tantôt comme le président des « amitiés ukrainiennes », a prononcé une brève allocution.
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