La France insoumise, d’abord, s’est démasquée.

En prenant de court ses partenaires, en s’imposant, dès 20 h 10, sur tous les plateaux de télévision, flanqué d’une Rima Hassan revêtue d’un keffieh et revenue à bride abattue de Bruxelles, bref en imposant, une fois de plus, sa présence, son style et sa brutalité, Jean-Luc Mélenchon a fini de se découvrir et de réduire au rang de figurants ses alliés du Nouveau Front populaire, condamnés à parler après lui, en duplex, sans solennité, dans le désordre.

Aurait-il voulu achever de les humilier qu’il n’aurait pas fait mieux.

Aurait-il voulu mettre en lumière la tricherie de cette alliance électorale qu’il n’aurait pas procédé autrement.

Il a définitivement fait entendre aux socialistes, écologistes, divers gauche qui ont cru en un remake des heures de gloire du mouvement ouvrier qu’il ne s’était jamais agi, dans son esprit, que d’une OPA menée par une secte violente, antiparlementaire, antisémite et dont on comprendra peut-être un jour que la vraie stratégie était une stratégie du chaos où l’important était de servir, non de rempart, mais de tremplin au Rassemblement national.

Les électeurs ne s’y sont pas trompés qui ont placé le piteux attelage plus bas que ne l’imaginaient les sondeurs.

Ils ont élu au premier tour quelques-uns de ses pires personnages (Panot, Caron, Obono, Chikirou, Delogu, j’en passe) ; mais cette fausse gauche, cette gauche indigne, cette gauche sous direction LFI à laquelle les apparatchiks des autres partis ont souscrit, soit par cynisme, soit par naïveté, est loin de la majorité.

Ce danger-ci est écarté.

Reste l’autre danger.

Reste le Rassemblement national qui est, lui, arrivé en tête et qui, même si son score est légèrement inférieur à ce que ses chefs escomptaient, même si les projections de second tour le donnent, pour parler encore comme les sondeurs, dans le bas de la fourchette de ce qu’il lui était permis d’espérer, demeure en position d’avoir une majorité absolue et de gouverner le pays.

Les électeurs ne veulent plus, dit-on, entendre de grandes phrases, de débats sur les valeurs et de condamnations morales du racisme et de la xénophobie ?

Cela me surprend. Mais admettons. Admettons, oui, qu’il ne serve plus à grand-chose d’en appeler aux principes ou à la généalogie (Waffen SS, collabos, etc.) du RN.

Il reste six jours, en revanche, ce lundi 1 er juillet, pour rappeler des faits simples et précis.

Il reste six jours pour se souvenir que ce parti dégagiste qui surfe sur l’éternel « tous pourris » de l’éternelle extrême droite vient de voir confirmée, par la Cour de cassation, sa condamnation pour « escroquerie » dans l’affaire des kits de campagne d’une précédente législative.

Il reste six jours pour documenter, comme nous le faisons à La Règle du jeu, les abus de biens sociaux, détournements de fonds publics, opérations de blanchiments, dont se sont rendus coupables nombre de cadres du parti et qui font probablement de celui-ci le parti le plus corrompu de France.

Il reste six jours pour faire entrer dans les esprits que, même si son programme était peu appliqué, le seul fait de son arrivée à Matignon, puis de la mise en œuvre des quelques mesures démagogiques qu’il nous présente comme des mesures d’urgence, aurait pour inévitable effet d’isoler la France sur la scène européenne, de dégrader son économie et de plonger les plus précaires dans une précarité plus grande encore.

Il reste six jours pour rappeler que Jordan Bardella est, comme la rouée Marine Le Pen, entouré de communicants qui ont travaillé pour les Assad père et fils, se sont mis au service de Poutine et des siens ou ont prôné la grande alliance des intégristes chrétiens et des islamistes radicaux.

Il reste six jours pour rappeler à Serge Klarsfeld que la communauté juive qui compte des dizaines de milliers de binationaux franco-israéliens serait l’une des premières visées par le climat de suspicion créé, dans les derniers jours de la campagne, par la désormais fameuse querelle de la « binationalité ».

Il reste six jours, en un mot, pour voter en faveur de tout candidat – à l’exception, bien sûr, des antisémites de La France insoumise – capable d’empêcher ce rassemblement d’incapables et de haineux d’avoir un siège de plus à l’Assemblée.

Écolos, sociaux-démocrates ou hérauts du Front populaire qui, comme François Ruffin, ont été honteusement floués… Électeurs de Raphaël Glucksmann dont on a volé les voix… Républicains de droite et du centre fidèles à l’héritage du gaullisme… Rescapés de la majorité sortante…

Il sera toujours temps, plus tard, de faire le procès de la dissolution, de son auteur ou de ceux qui ont cédé à la tentation du sauve-qui-peut.

Tous, pour l’heure, ont leur place dans le « front démocratique » en formation.

Pour tous, il y a une urgence et une seule : faire barrage au RN et empêcher le scénario de cauchemar qui verrait le président de la République forcé de cohabiter avec l’incompétent et inquiétant M. Bardella.


Autres contenus sur ces thèmes