Quand un écrivain s’est fait connaître par des essais et qu’il entreprend d’écrire un roman, on suppose qu’il va procéder à la démonstration du bien-fondé de ses idées. Ainsi attendait-on que Bernard-Henri Lévy nous donne un roman d’intellectuel. Première surprise : c’est un roman de vrai romancier. Certes l’histoire contemporaine y est constamment évoquée mais pour montrer les répercussions d’événements très précis sur des destins individuels et même très particulier. Par exemple, il n’est pas rare qu’un gosse de riche devienne gauchiste, mais que, tel Baader, il s’engage dans le terrorisme à tout va, voilà qui est plus rare. C’est le cas du héros du Diable en tête. L’auteur se garde de commenter ses aventures et même il ne les raconte pas lui-même : la vie de Benjamin nous est livrée chronologiquement, mais en cinq parties dont les narrateurs sont différents. Deuxième surprise : l’auteur n’a pas seulement voulu varier les voix et les points de vue, selon une technique utilisée par d’autres romanciers. Les témoignages qu’il a rassemblés ne se recoupent pas exactement : souvent les faits ne sont pas les mêmes ici et là, parfois parce que le témoin se trompe ou est trompé, soit parce qu’il veut tromper. On a finalement l’impression à une tragi-comédie des erreurs. Et cela d’autant plus que les idées politiques et philosophiques des personnages valsent aussi bien que leurs sentiments. Troisième surprise et qui est de taille : ce sont les femmes qui tiennent les meilleurs rôles dans ce livre. La mère de Benjamin et l’une de ses maîtresses s’expriment à la première personne de manière plus convaincante. Vraiment oui, BHL est un romancier.


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